CENTRE NATIONAL D'ETUDES SPATIALES

Groupe d'Etudes des Phénomènes Aérospatiaux Non-identifiés

Toulouse, le 29 septembre 1981
N° 236 CT/GEPAN


 

NOTE D'INFORMATION N°4


 

Les études de Phénomènes Aérospatiaux Non-identifiés aux Etats-Unis

3ème Partie : "La fin des recherches officielles"




AVERTISSEMENT

Les Notes d'informations sont généralement constituées de documents et de comptes rendus de travaux auxquels le GEPAN n'a pas participé. Le GEPAN a alors seulement choisi de les publier en raison de leur importance historique ou théorique, pour une bonne connaissance et compréhension du problème des phénomènes aérospatiaux non identifiés. Cependant, cette décision de publication ne signifie en rien que le GEPAN s'associe aux idées, théories ou conclusions présentées dans ces textes. Elles restent sous la responsabilité exclusive de leurs auteurs.
C'est dans les Notes Techniques que le GEPAN fournit les informations relatives à ses propres activités.




TABLE DE MATIERES




LES ÉTUDES DES PHÉNOMÈNES AÉROSPATIAUX NON IDENTIFIÉS AUX ETATS-UNIS

3e PARTIE :
LA FIN DES RECHERCHES OFFICIELLES


 
 


 

EVALUATION DU RAPPORT CONDON SUITE
AU PROJET COLORADO SUR L'ÉTUDE DES OVNI

Par P. A. STURROCK

SUIPR Report n° 599
Octobre 1974

Institute for Plasma Research
Stanford University
Stanford, California

RESUME

Le rapport "CONDON" présentant les découvertes dues au Projet COLORADO, suite d'une étude scientifique des objets volants non identifiés, est le document le plus important en ce qui concerne la position scientifique sur ce problème.

L'évaluation du présent rapport contient un exposé global, une analyse des évidences par catégories et une discussion de la méthodologie scientifique.

L'exposé montre que la plupart des cas étaient étudiés par du personnel jeune, le personnel plus âgé y ayant très peu participé et le Directeur pas du tout.

L'analyse des évidences par catégories montre qu'il y a une différence substantielle et significative entre les découvertes du personnel de ce Projet et celles que le Directeur lui attribue. Bien qu'ensemble, personnel et Directeur soient prudents dans leurs conclusions, le personnel a tendance à insister sur les cas douteux et sur les questions restant sans réponse, tandis que le Directeur insiste sur les difficultés d'une étude plus approfondie et sur la probabilité de ne pas aboutir à un Progrès scientifique. On explique que la méthode appropriée à ce phénomène est plus proche de l'astronomie que de la physique. La nécessité d'esquiver les arguments liés à une théorie et la difficulté de le faire, sont soulignées.

1. INTRODUCTION

Le "phénomène OVNI" pris en considération pour l'étude de ces évènements qui donnent lieu à des rapports sur les "objets volants non identifiés", est d'un intérêt public très répandu mais est de peu d'intérêt pour la plupart des scientifiques qui ont tendance à considérer l'étude de ce phénomène comme peu productif et non respectable. Une récente publication dans la revue "Science" ( 1 ), qualifie la discussion sur les objets volants non identifiés, de "pseudo-science" et en définitive de "poison intellectuel".

A ce jour, les déclarations les plus influentes sur ce sujet, ont été rédigées par un Institut scientifique sous la référence ( CR 905-931 )* : "Rapport Robertson" ( 1953 ) et "Rapport Condon" ( 1968 ) ( 2 ). Le groupe Robertson était composé par d'éminents scientifiques ayant siégé ensemble pendant une période de cinq jours à la C.I.A., afin de déterminer si les OVNI constituent un danger pour la défense nationale. Le groupe des scientifiques a conclu que "le phénomène n'était pas assez évident pour qu'il soit nécessaire de réviser les convictions scientifiques actuelles" et que "cette même preuve... n'indique pas que ce phénomène présente un danger physique pour la sécurité nationale".

(*) Les références à des pages du Rapport Condon sont notées par le préfixe "CR".

Le rapport Condon est un repère dans les études sur les OVNI, et constitue une référence pour tous les travaux futurs. Le Directeur du Projet, le professeur Edward U. CONDON, était un éminent scientifique et un homme au caractère fort et indépendant. Le travail fut mené pendant deux ans, avec du personnel scientifique, sous contrat de l'Armée de l'Air. Le Rapport Condon n'est pas, comme le Rapport Robertson, un document signé par plusieurs scientifiques, mais par l'appréciation de chacun qui, groupés, arrivent à la même conclusion. Les Sections** CR I et CR II soit "Conclusions et Recommandations" et "Sommaire de l'étude" sont écrits par CONDON lui-même. Le sommaire de CONDON est suivi par sept résumés des différents aspects des recherches écrits par des membres du personnel. Ces résumés sont suivis par 290 pages de cas étudiés. Le rapport complet avec le matériel supplémentaire et périphérique, est de 1000 pages.

(**) Les Sections du Rapport Condon sont désignées par "Section CR I"... pour les distinguer des Sections du présent document.

L'impression générale donnée par CONDON est qu'il n'y a rien d'anormal ou de significatif dans le phénomène OVNI. Malgré le fait que cela est l'opinion d'un seul homme, le point de vue de CONDON est sensiblement renforcé par le fait que le Rapport Condon a été revu par un groupe d'éminents scientifiques appartenant à l'Académie Nationale des Sciences. Cette dernière a approuvé et les méthodes, et les découvertes du Rapport. Nous reviendrons brièvement sur ce Rapport dans le chapitre V.

L'attitude des scientifiques vis-à-vis du problème OVNI sera discutée dans la Section II. Un exposé du Rapport Condon suit dans la Section III. Dans la Section IV, nous comparerons l'exposé de CONDON avec les sept autres exposés des membres, ce qui nous permet de procéder à la comparaison entre les exposés et les cas étudiés. La Section V nous relate les méthodes scientifiques et la Section VI est destinée à la discussion.

2. LES SCIENTIFIQUES ET LE PHENOMENE OVNI

Malgré le fait, indiqué en Section I, que les Institutions scientifiques ont tendance à minimiser la signification du phénomène OVNI, certains hommes de sciences pensent que le phénomène est réel et significatif. Les exposés par ces scientifiques ont pu être entendu au cours de la session du Comité des Sciences et de l'Aéronautique, en 68.
Un exposé plus récent est écrit dans le livre du professeur J. Allen HYNEK. Il faut aussi constater qu'une société nationale scientifique, l'Institut Américain d'Aéronautique et d'Astronautique ( AIAA ) a créé un sous-comité en 1967 ayant pour but "d'obtenir une perspective plus récente et plus objective du phénomène OVNI". Une déclaration émanant de ce Comité a été publiée dans la revue "Astronautics and Aeronautics" en novembre 1970. Ce Comité a aussi publié deux cas d'OVNI, chacun ayant été pris en considération par l'équipe Condon. Les versions de l'AIAA de ces cas étaient, par rapport aux versions données par le Rapport Condon, plus détaillées et basées sur des éléments plus étendus.

L'attitude négative de l'Institut scientifique vis-à-vis du problème OVNI n'influence pas seulement les hommes de sciences mais est aussi représentative de ses opinions. Il est nécessaire d'essayer de comprendre cette attitude.

La plupart des scientifiques n'ont jamais eu l'occasion d'être confrontés à des données concernant les OVNI. Pour un scientifique, la source principale de ses informations, est le journal scientifique. A quelques rares exceptions près, les journaux scientifiques ne publient jamais de rapports concernant les observations d'OVNI. La décision de non-publication prise par l'éditeur fait suite aux avis donnés par le contrôle de lecture. Cette procédure a des renforcements internes : en apparence, le manque d'éléments confirme le point de vue qu'il n'y a rien sur le phénomène OVNI, rendant ainsi nuls les éléments présentés.

Quelques fois, quand un phénomène bizarre est publié en termes sensationnels dans la presse, et que les justifications sensées du même phénomène ne sont jamais reprises dans les journaux scientifiques, on peut comprendre que l'homme de sciences considére ces publications comme fausses ou encore, dans le meilleur des cas, il assimile ces phénomènes à des objets familiers ou au pire à des canulars destinés à un public trop crédule.

Tout scientifique sacrifiant un peu de temps à examiner ces rapports, simples et dignes de foi, réalise que beaucoup de ceux-ci peuvent être interprétés comme mirages, ballons-sondes ou autres phénomènes naturels. Une étude plus approfondie peut révéler des rapports dramatiques. Si ceux-ci sont corrects, ils nous indiquent que la Terre est visitée par des membres d'une civilisation étrangère, voyageant dans des appareils conduits d'une manière fantastique. En face d'une telle possibilité, le scientifique mesure l'implication d'une telle hypothèse. Il fait ses déductions à la suite d'une énorme masse d'informations concernant le système solaire, l'univers, les lois physiques et les conditions dans lesquelles la survie de l'organisme est possible. Utilisant ces informations, le scientifique arrive à la conclusion que cette hypothèse doit être rejetée.

Un exemple de ce genre d'argument est avancé par CONDON lui-même ( CR 98 ). Partant de l'assertion comme quoi une civilisation étrangère est originaire d'une planète du Soleil ou autre étoile, CONDON affirme qu'une civilisation habitant une planète attachée à une étoile proche, ne projettera pas un voyage vers la Terre avant de savoir si une technologie avancée est établie sur cette Terre. Partant de cette considération, il estime qu'il n'est pas possible qu'une telle civilisation visite notre Terre, dans les 10 000 000 années à venir. En ce qui concerne le système solaire, CONDON part du point de vue que seuls Vénus et Mars peuvent avoir une possibilité de vie, tout en estimant que notre connaissance de ces planètes ne donne aucune preuve d'existence d'une civilisation avancée.

Il s'avère pour cela, que la différence d'attitude envers le phénomène OVNI entre les scientifiques et le public, peut être comprise, dans une certaine mesure comme une plus grande exigence de preuves de la part des premiers, et aussi en partie en raison d'une grande quantité d'informations qu'ils possèdent qui poussent à des interprétations en termes familiers et non en terme de civilisations étrangères. Néanmoins, il y a un autre facteur susceptible d'influer les hommes de sciences : c'est la peur du ridicule.

D'autres commentaires peuvent être avancés concernant l'attitude de certains groupes scientifiques. Par exemple, les physiciens attachent plus d'importance à des cas concluants comme celui de la démonstration de THOMSON sur "la nature des particules des rayons cathodiques", démonstration qui a marqué l'évolution physique, ou encore la démonstration de DAVISSON et GERMER sur "la nature des ondes d'électrons", etc... Cette attitude est en fait renforcée par le cas hypothétique suivant de CONDON, qui pourrait convaincre tous les scientifiques que les OVNI sont des vaisseaux appartenant à une civilisation étrangère ( CR 26 ) :

"Le doute sur la réalité extra-terrestre sera élucidé en quelques minutes quand un OVNI se posera sur la terrasse d'un hôtel où a lieu une session de la Société de physique américaine. Ses habitants sortant de leur vaisseau, présentant un papier spécial à l'Assemblée des physiciens, relatant leur origine et leur technologie concernant le fonctionnement de leur vaisseau spatial. Ensuite, des questions seront posées par l'audience".

A l'inverse, l'information concernant le phénomène astronomique est accumulée soigneusement. En outre, l'image sortant des données astronomiques peut demeurer non concluante pendant plusieurs années et peut-être même contradictoire. On note que les observations astronomiques constituent une activité passive, essentiellement différente de celles liées à une démarche expérimentale. En conclusion, l'étude du phénomène OVNI a plus de similitude avec la recherche astronomique qu'avec les études en sciences physiques, en laboratoire.

3. RESUME

Le rapport qui présente les résultats du Rapport Colorado à la suite d'une étude scientifique des OVNI, ne donne pas l'impression d'un programme de recherches intègre. Le budget total pour une période de deux années était de 500 000 dollars ; mais, il n'y avait que 37 personnes, membres du Projet, les autres personnes participant, étaient consultées en supplément. Il est clair que la plupart du personnel, membres du Projet, ne consacrait qu'une fraction de son temps à ce projet.

Le professeur CONDON était le Directeur du Projet. Les personnes suivantes, étaient classées comme "enquêteurs principaux" : Stuart W. COOK ( professeur de psychologie ), Franklin E. ROACH ( professeur d'astrogéophysique ) et David R. SAUNDERS ( professeur de psychologie ). En tant que supplément, William A. SCOTT ( professeur de psychologie ) est à enregistrer comme "Enquêteur principal adjoint". Tous étaient membres de l'Université du Colorado. M. Robert J. LOW ( diplômé en Electricité et en Administration des affaires ) était le "coordinateur du Projet". Ensuite, en supplément, il y avait cinq "associés de recherches" : Norman E. LEVINE ( Docteur en Engineering ), Ronald I. PRESNELL ( Maîtrise, Engineering ), Gérald M. ROTHBERG ( Docteur en Physique ), Herbert J. STRENTZ ( Maîtrise, Journaliste ) et James E. WADSWORTH ( Sciences du comportement ).

L'essentiel du travail effectué pour ce Rapport, se trouve au chapitre CR IV, qui présente 59 cas. Le Directeur ne participera pas à ce travail. Un seul enquêteur principal participera à l'étude de deux cas, un autre à un seul cas. L'enquêteur principal adjoint ne participera pas à ce travail, le coordinateur travailla sur 8 cas, le Dr LEVINE ( enquêteur associé ) s'occupa de 8 cas, le Dr ROTHBERG d'un seul cas, M. WADSWORTH de 17 cas.

Des études importantes de ces cas furent faites par Roy CRAIG ( Docteur en Chimie-Physique) et William HARTMANN ( Docteur en Astronomie ), enregistrés comme simples membres. CRAIG et HARTMANN ont travaillé sur 14 cas.

La partie la plus importante du Rapport est celle de la Section CR III qui présente 7 résumés de travail du Rapport Colorado. Aucun n'était écrit par le Directeur, un seul par l'enquêteur principal ( ROACH ), aucun par les enquêteurs associés. Trois chapitres étaient écrits par CRAIG, un par HARTMANN, un par Aldora LEE ( Docteur en Psychologie sociale ) et un par Gordon THAYER ( Physique ).

La Section CR V présente l'aspect historique du phénomène OVNI, et comprend 3 chapitres. La Section CR IV traitant du "contexte scientifique" comprend 10 chapitres. Parmi ces 13 chapitres, un seul fut écrit par le Directeur. Les 12 autres chapitres restants, étaient écrits par des membres qui n'ont pas été mentionnés précédemment dans ce texte.

En ce qui concerne la Section CR III-V, on peut constater qu'une contribution substantielle a été faite par l'enquêteur principal ( ROACH ) et par le coordinateur du Projet. Les Sections CR I "Conclusions et Recommandations" et CR II "Résumé de l'Etude" étaient écrites par le Directeur. L'ensemble est résumé en Table 1.

L'importance de chaque étude scientifique est la définition du champ de cette étude et la définition des principaux termes impliqués. CONDON affirme ( CR I ) que "le but de l'étude a été d'essayer d'apprendre quelque chose des rapports sur les OVNI, pouvant être considéré comme un apport à la connaissance scientifique". Sa conclusion est ( CR I ) que "rien venant de l'étude sur les OVNI dans les 20 dernières années, n'a aidé la connaissance scientifique... une étude plus étendue du phénomène OVNI ne peut probablement pas se justifier par l'espoir de faire progresser la Science".

La définition clé est donnée par CONDON, comme suit :

"Un objet volant non identifié ( OVNI ) est ici défini comme un stimulus conduisant au témoignage par un ou plusieurs individus d'une chose vue dans le ciel ( ou d'un objet supposé capable de voler mais ayant fait un atterrissage ), et que l'observateur ne peut classer comme ayant une origine naturelle. La chose lui semble tellement étrange qu'il informe la police, les officiers du gouvernement, la presse et peut-être un organisme privé faisant des études sur ces objets. Définie de cette façon, l'existence des OVNI ne pose pas de problème étant donné qu'il existe de nombreux rapports sur les OVNI et que le stimulus de chaque rapport est en conséquence d'après cette définition, un OVNI. Le problème est de reconnaître les différentes catégories de stimulus qui donnent lieu à des rapports d'OVNI".

3. Identifié ( de façon plus ou moins concluante ) : 25 cas
( 3, 9, 11, 14.3, 14.5, 14.6, 15, 18, 20, 25, 27, 28, 29, 35, 36, 37, 40, 41, 43, 49, 50, 51, 54, 55 )

4. Non identifié : 14 cas
( 1, 5, 6, 8, 10, 12, 13, 14.2, 17, 21, 23, 34, 47, 59 )

5. Non estimé, vu dérobade de l'Armée de l'Air : 1 cas
( 30 )

6. Illusions : 2 cas
( 16, 38 )

7. OVNI possibles : 2 cas
( 14.1, 57 )

8. OVNI probables : 2 cas
( 2, 46 )

4. ESTIMATION DES PREUVES PAR CATEGORIES

Nous estimons les preuves par catégories mentionnées dans la Section CR III, et la Section CR IV du Rapport.

4.1. PREUVE NARRATIVE

Alors que les cas récents étudiés ne fournissent pas de preuves solides, même dans le contenu narratif, en faveur de la présence physique d'un véhicule non terrien, des narrations d'évènements passés, tels que l'incident de BEVERLY ( Mass. ) en 1966 ( cas 6 ), ne pourraient recevoir aucune autre explication si les témoignages sont pris tels qu'ils sont.

Le cas 6 est relaté au CR 266-270. Le résumé de ce cas ( CR 266 ) est le suivant :

"Trois femmes étaient sur un terrain de sport d'un lycée, afin d'identifier une lumière brillante qui avait effrayé une fillette de 11 ans. Elles ont indiqué que l'une des trois lumières manœuvrant dans le ciel, vola vers elles sans bruit, à une altitude d'environ 20 à 30 Pieds. Elles le décrirent comme un objet solide flottant ( sic ) de forme discoïdale, de la taille d'une automobile. Deux policiers répondant à un message téléphonique concernant l'observation d'OVNI, ont constaté qu'un objet extraordinaire volait au-dessus du lycée. L'objet n'a pas pu être identifié. Dans une certaine mesure, l'observation peut être apparemment une observation de la planète Jupiter".

La plupart des scientifiques qui ont étudié les OVNI, adoptent une définition plus restreinte en excluant les rapports qui ont été identifiés sans hésitation.

En outre, plusieurs membres du Projet ont adopté une définition différente de l'OVNI, puisque l'on trouve dans la déclaration ( CR 248 ) "la prépondérance des preuves indique la possibilité d'un OVNI authentique dans ce cas" et en CR 256 "la probabilité de la présence d'au moins un OVNI parait très élevée".

Dans la plupart des recherches scientifiques, les chercheurs ont dans leur esprit une ou plusieurs hypothèses. CONDON mentionne spécifiquement ce qui suit :

"L'idée que certains OVNI peuvent être des vaisseaux de l'espace, envoyés vers la Terre par une autre civilisation, habitant une autre planète ou système solaire ou une planète associée à une autre étoile située à une distance plus éloignée que le Soleil, est appelée l'hypothèse extra-terrestre ( HET )".

C'est plutôt ambiguë que CONDON introduise aussi le terme "réalité extra-terrestre" ( RET ) qui représente apparemment la croyance que l'HET est vraie. La conclusion de CONDON ( CR 25 ) est "qu'il n'existe actuellement aucune preuve directe pouvant prétendre que les OVNI soient des vaisseaux d'une autre civilisation visitant la Terre". En arrivant à cette conclusion, CONDON prend la position ( CR 19 ) "que si un rapport OVNI peut être expliqué plausiblement dans des termes ordinaires, nous acceptons cette explication même s'il n'y a pas assez de preuves pour qu'aucun doute ne soit possible".

Pour évaluer les bases des conclusions de CONDON, nous pouvons examiner les résumés des membres du personnel rédigés en Section III. Ces résumés en retour, se fondent sur les études de cas. Dans chaque Section, nous examinerons les preuves telles qu'elles sont classées dans les résumés en se reportant aux cas spécifiques si cela semble opportun. Dans le reste de cette Section, nous classerons les cas selon les conclusions tirées par les membres du Projet.

En plus des trois observations faites par des astronautes ( lesquelles seront traitées séparément dans le Chapitre IV ), 59 cas sont analysés dans la Section CR IV. Un de ces cas ( cas 14 ) comprend 6 évènements séparés. Un autre cas ( cas 38 ) traite "800 observations d'OVNI". Les expertises furent les suivantes :

1. Pas d'évènement : 1 cas
( 19 )

2. Information inconsistante, canular possible, sans valeur : 17 cas
( 4, 7, 14.4, 22, 23, 24, 26, 32, 33, 39, 42, 44, 48, 52, 53, 56, 58 )

4.2. PREUVE PHOTOGRAPHIQUE

Dans cette catégorie, HARTMANN ( CR 86 ) décrit "un groupe de non identifiés" qui n'est pas "contradictoire avec l'hypothèse que des vaisseaux inconnus et extraordinaires ont pénétré dans l'espace aérien des États-Unis". Malgré cela, aucun "ne donne assez de preuves permettant d'établir cette hypothèse".

Plus loin, HARTMANN remarque :

"Après examen, restent un petit nombre de cas ( de l'ordre de 2 % ) qui sont constitués de témoignages de bonne qualité décrivant des objets dans le ciel, non identifiés ou non identifiables. La présente information est, sans pour autant l'établir, compatible avec les hypothèses :

  • que tout le phénomène OVNI est le produit d'informations erronées, de reportages sans valeur ou de canulars fabriqués, ou bien,
  • qu'une petite part du phénomène OVNI se compose d'évènements extraordinaires".

Par exemple, prenons les cas 46 et 47. En ce qui concerne le cas 46 ( McMINVILLE, Oregon,11 mai 1950 ), HARTMANN arrive à la conclusion suivante ( CR 407 ) :

"Le présent cas est un des rares rapports d'OVNI dans lequel tous les facteurs examinés ( géométrie, psychologie, et physique ) aboutissent au fait qu'un objet volant extraordinaire, argenté, métallique, en forme de disque de 10 mètres de diamètre, et manifestement artificiel, a été observé en vol par deux témoins. On ne peut dire que les données écartent complètement un canular, mais il y a certains points comme l'exactitude des mesures photomètriques des négatifs originaux qui plaident contre une falsification".

HARTMANN décrit le cas 47 ( Great Falls, Montana, 15 août 1950 ) dans le résumé suivant :

"Témoin 1 : Directeur général d'une équipe de Base-ball à Great Falls. Témoin 2 : Le Secrétaire. Ils ont observé deux lumières blanches se déplaçant doucement dans le ciel. Le témoin 1 a pris un film 16 mm de ces lumières. Les deux témoins, individuellement, ont récemment réaffirmé leur observation, et il n'y a aucune raison d'en contredire la validité. Le cas reste inexplicable. Les analyses indiquent que les images prises sur le film sont difficilement comparables à un avion ou autre phénomène connu. Néanmoins, on ne peut écarter complètement l'hypothèse d'un avion".

Il est intéressant de comparer les études faites par HARTMANN sur les cas avec les résumés en deux pages "Études des photographies d'OVNI" ( CR 35.37 ) faits par CONDON. Un seul paragraphe est basé sur les travaux de HARTMANN. Citons :

"HARTMANN fait une étude détaillée sur 35 cas photographiques ( paragraphe 14 - 3ème chapitre ) prenant comme référence la période de 1966-68 et une sélection de 18 cas plus anciens, largement détaillés dans la littérature OVNI. Ces études photographiques nous amènent à reconnaître dans un certain nombre des photos publiées, des objets ordinaires, des montages ou des contre-façons des choses banales photographiées dans des conditions particulières".

En fait HARTMANN a discuté sur 14 cas, dont 6 émanant de la période 1966-68. Concernant le cas de McMINVILLE ( cas 46 ), CONDON ne se réfère pas à l'analyse de HARTMANN, mais à une analyse faite par Everitt MERRITT ( lequel n'a pas contribué à la constitution du Rapport et n'était pas membre du Projet ), qui a trouvé que "les photos d'OVNI sont trop floues et ne valent pas la peine d'une analyse paramétrique". CONDON a cité une autre analyse de MERRITT ( non mentionné dans le Rapport ), sur un cas considéré comme un canular. CONDON discuta aussi le cas de deux photos publiées dans la revue "Look", affirmant que l'une était due à un simple phénomène naturel et l'autre à un simple effet photographique.

En résumé, il s'avère qu'il y a très peu de rapports entre d'une part les études et exposés de HARTMANN et d'autre part, les appréciations de photographies d'OVNI de CONDON.

4.3. CAS D'OBSERVATIONS RADAR-VISUEL

Une importance spéciale peut être attachée aux cas d'observations faits simultanément par radar et de visu, et pour lesquels ces observations s'accordent. De tels cas impliquent plusieurs témoignages : des observations effectuées sur deux ou plusieurs bandes du spectre électromagnétique, l'observation radar donnant la mesure distance et parfois l'altitude. Ces cas sont traités dans la Section CR III, chapitre 2, "Études sur le terrain" de CRAIG ( CR 51-57 ) et la Section CR III, chapitre 5, "Analyses optiques et radar de cas sur le terrain" de THAYER ( CR 115-116 ).

THAYER dans son résumé des cas radar-visuel, déclare ( CR 175 ) :

"Il n'y a que peu de cas radar-visuel qui n'aient une explication plausible, mas ils sont assez significatifs ( 1482N, cas 2 )".

Le résumé du cas 2 ( Greenwich, été 1956 - CR 248-256 ) est le suivant :

"Au moins un OVNI est repéré par le contrôle radar du trafic ( par deux stations USAF de l'Armée de l'Air ) correspondant apparemment à l'observation optique d'un objet rond, blanc, avec des mouvements rapides, et changeant de directions brusquement. Une interception a été tentée par un avion de chasse de l'Armée de l'Air. L'avion a été dirigé vers l'OVNI par le contrôle radar et le pilote ayant signalé le contact radar de l'avion et la position de tir radar, l'OVNI tourna derrière l'avion tout en le suivant, malgré les manœuvres d'évasion du pilote. Le contact fut interrompu quand l'avion retourna à la base, par manque de carburant. Les preuves prépondérantes indiquent la possibilité d'un véritable OVNI dans ce cas. Le temps était clair avec une bonne visibilité".

Ce cas a été décrit par THAYER, dans le cadre des études de l'AIAA. Il est intéressant de noter la conclusion donnée par THAYER, à la fin de cet article, reflétant son point de vue après une étude intensive :

"En conclusion, avec deux contacts redondants - le premier, avec radar au sol, combiné avec l'observation visuelle du sol et l'observation visuelle à bord de l'avion, et le second, avec deux groupes radars différents - l'OVNI de Bentwaters-Lakenheath présente un des cas les plus significatifs en ce qui concerne l'observation combinée radar-optique. Prenant en considération la haute "crédibilité" de l'information, la cohérence et la continuité des données combinées avec un haut degré "d'étrangeté", c'est sûrement un des cas les plus troublants d'OVNI connus à ce jour".

L'autre cas ayant un caractère d'un intérêt spécial, est le cas 5 ( CR 260-266 ) identifié dans le Rapport CONDON comme "Affaire South Central, Fall, 1957". Ce cas a été revu par CRAIG ( CR 56-58 ). Il a souligné le fait "qu'il n'y avait pas de trace de cet incident dans les fiches Blue Book ni dans les fiches de l'Etat Major du NORAD". Il s'avère que l'équipe Condon a incorrectement daté l'évènement au 9 septembre 1957 au lieu de la date véridique du 17 juillet 1957. CRAIG en décrivant le phénomène, déclarait :

"L'objet disparaissait et réapparaissait subitement dans une autre position, visible à l'œil nu et par les radars. Puisqu'il y avait correspondance entre observation visuelle et observation radar, l'explication d'une réflexion sol/radar n'était pas une explication satisfaisante. D'autres explications comme avions, météores, et plasmas, semblent aussi insatisfaisantes".

CRAIG conclut en CR 57 que "dans la mesure où le rapport est juste, cela décrit un phénomène inhabituel, intriguant et étrange qui, en l'absence d'informations complémentaires, doit être considéré comme non identifié".

Ce cas est également commenté par TRAYER dans son résumé ( CR 136-139 ). THAYER tente une explication en termes de "propagation anormale d'échos et une source lumineuse du sol non identifiée", mais il ajoute "il y a plusieurs aspects non explicables de cette observation et une solution comme indiquée ci-avant, quoique possible, n'est pas hautement probable". Le lecteur est incité à évaluer ces déclarations en revoyant les cas ( CR 260-266 ) et en relisant les comptes-rendus plus détaillés présentés par l'AIAA ( 6 ). Le Dr J.E. McDONALD, l'auteur de l'article de l'AIAA, détermina la date exacte de cet évènement qui lui permit d'obtenir le procès-verbal de l'Armée de l'Air, compte-rendu que l'équipe Condon n'a pas pu obtenir. Le cas AIAA est pour cela plus complet, plus détaillé et plus digne de foi que l'étude présentée dans le Rapport Condon. Le résumé de ces faits, fait par McDONALD, est le suivant :

"Un avion RB-47 équipé avec des appareils de contre-mesure électronique, ( ECK ), comptant un équipage de 6 officiers, a été suivi par un OVNI sur une distance de plus de 700 milles pendant 1 h 15 mn en provenance du Mississipi, à travers la Louisiane et le Texas et en direction de l'Oklahoma. L'objet visible à plusieurs reprises par l'équipage sous la forme d'une lumière très intense, était suivi par le radar du sol et détecté par l'appareillage ECM du RB-47. Ce qui donne le plus d'intérêt à ce cas est le fait de plusieurs disparitions et réapparitions enregistrées simultanément sur les 3 fréquences physiquement distinctes. La rapidité des manœuvres effectuées étonna un équipage réputé pourtant comme expérimenté".

CONDON dans son "Résumé de l'étude" consacre trois pages de discussions au repérage d'OVNI par radar, mais le commentaire sur les cas étudiés par le Projet se limite à deux paragraphes. Dans l'évaluation de ces cas il a cité, du résumé de THAYER : "...il n'y a pas de cas où les informations météorologiques disponibles ont tendance à nier l'hypothèse d'une propagation anormale...". Cela est pour le moins une citation malheureuse qui implique que THAYER regarde l'hypothèse d'une propagation anormale comme une explication plausible de chaque cas. Une situation plus complète des remarques de THAYER ( CR 172 ) est la suivante :

"Le lecteur doit noter que l'affectation des cas dans la catégorie d'une probable propagation anormale a pu être faite seulement sur la base d'un témoignage d'observation. C'est dire qu'il n'y a pas de cas où les informations météorologiques disponibles aient tendance à réfuter l'hypothèse d'une propagation anormale impliquant que ces cas doivent être attribués à une autre catégorie".

Dans le tableau ( CR 173 ) auquel THAYER se réfère, nous voyons que 19 cas sur 35 ont comme explication plausible une propagation anormale.
L'estimation de THAYER est probablement présentée plus clairement par une autre citation ( CR 174 ) : "Là où les informations d'observations indiquent une propagation anormale comme cause probable d'un incident OVNI, les données météorologiques sont indiscutablement en faveur d'une hypothèse de propagation anormale".

La conclusion de THAYER est qu'une fraction substantielle des observations radar est probablement due aux effets des propagations anormales mais il est également évident que THAYER n'attribue pas toutes ces observations radar à ce phénomène. L'impression donnée par CONDON concernant les cas radar-visuel est pour cela en contradiction avec celle donnée par THAYER dans son résumé ou dans les études de cas sur lesquelles le résumé de THAYER se fonde.

4.4. DÉTECTION RADAR SANS OBSERVATION VISUELLE

CRAIG et THAYER attachent tous deux une signification spéciale au cas 21 ( CR 310-316 ) ( Colorado Springs, Colorado, 13 mai 1967 ) dans lequel des signaux nets et consistants ont été observée par deux radars sans pour cela qu'il y ait eu une observation visuelle. Le résumé de ce cas ( désigné en CR 130 par "South Montain" lieu A, printemps 1967 ) est le suivant :

"Les opérateurs des deux radars d'aérodromes ont signalé qu'un spot équivalent à un avion suivait un avion commercial et l'ayant dépassé sur le côté, poursuivait son chemin avec une vitesse d'environ 200 nœuds jusqu'à ce qu'il eut disparu du champ du radar.
Il n'y avait aucun objet visible de la tour de contrôle. En se basant sur le rapport des témoins, et l'enregistrement des données météorologiques, les explications basées sur les propagations atmosphériques anormales ou une image capricieuse paraissent insuffisantes. Le cas n'est pas convenablement expliqué en dépit de la physionomie qui suggère un effet de réflexion
( voir Section CR III, chapitre 6 )".

( le chapitre 6 de la Section CR III est consacré aux observations visuelles faites par les astronautes américains et ne contient rien concernant ce cas ).

CRAIG dans son résumé "Études sur le terrain" fait le commentaire suivant ( CR 72 ) :
"Parmi les cas récents impliquant une observation radar l'un d'eux resta particulièrement troublant après analyse des informations, parce qu'une propagation anormale et autre explication commune ne peuvent apparemment justifier l'observation".

Dans le résumé "Analyse optique des radars", TRAYER a consacré plus d'une page à ce cas ( CR 170- 71 ). Il constate que "c'est seulement un cas radar mais qu'il est très intéressant puisque l'OVNI n'était pas visible, et cela malgré le fait qu'il aurait dû être visible".
Il indique que le fait que l'objet n'était pas visible du sol, ni de l'avion de la "continental Airlines" qui le suivait, ni de l'avion Braniff qui atterrissait, l'OVNI suivait la procédure correcte d'un avion en dépassement ou d'un avion pratiquant le système d'approche aux instruments, sans intention de se poser". L'opinion de TRAYER est "un écho fantôme doit être éliminé". Il conclut que "ce cas reste un des cas de radar les plus mystérieux enregistrés, sans qu'on puisse jusqu'à ce jour tirer une conclusion. Il semble inconcevable qu'un écho de propagation anormale se comporte comme décrit, particulièrement dans le changement d'altitude enregistré, même si une anomalie de propagation avait été probable à ce moment. En fonction des données météorologiques, il semblerait qu'une telle anomalie soit improbable. D'ailleurs, quelle est la probabilité qu'une anomalie de réflexion se produise une seule fois, et semble alors exécuter une parfaite approche aux instruments ?".

CONDON ne fait pas explicitement mention de ce cas. Sa seule référence en rapport est la citation de THAYER déjà notée : "Il n'y a pas de cas où les données météorologiques disponibles tendent à nier l'hypothèse d'une anomalie de propagation". Le lecteur pourra tirer ses propres conclusions du contraste certain entre les études de cas et les résumés des membres du Projet, d'une part et le résumé de CONDON, d'autre part.

4.5. PREUVE DIVERSE

Une mention très brève a été faite sur d'autres types de preuves considérées dans ce rapport. Le chapitre 6 de la Section CR III, concernant les "Observations visuelles faites par des astronautes américains", étudiées par le Pr Franklin E. ROACH ( CR 176-208 ) nous révèle le cas suivant dans le paragraphe final "Résumé et évaluation" :

"Les trois observations inexpliquées qui ont été extraites d'un grand nombre de rapports sont un défi à l'analyste. La première est particulièrement troublante : une observation de jour, d'un objet présentant des détails tels que des bras ( antennes ? ) sortant d'un corps ayant une dimension angulaire notable. Si l'enregistrement par le NORAD des objets à proximité du vaisseau spatial GT4 au moment de l'observation est complet, comme on peut le penser, nous devons trouver une explication rationnelle, ou bien le garder sur la liste des non identifiés".

CONDON en discutant de ces observations ( CR 42-43 ) remarque que les trois observations sont "un défi à l'analyse" et que "rien de définitif ne permet de justifier l'hypothèse extra-terrestre à la vue de ces observations sporadiques".

Concernant les "preuves physiques directes", CRAIG ( CR 94-97 ) attache une signification spéciale "aux fragments métalliques tombés sur Terre, à UBATUBA, Sao Paulo, Brésil, à la suite d'une explosion d'un véhiculé extra-terrestre. Le métal serait d'une telle pureté qu'il ne pourrait être un produit de la technologie terrestre". L'enquête effectuée par des membres du Projet Colorado a découvert un échantillon de "magnésium sublimé triple" fabriqué par la Dow Chemical Company et ayant un niveau d'impureté plus faible que celui de l'OVNI du Brésil.
Néanmoins l'analyse a montré que l'échantillon contenait à la fois du Baryum et du Strontium, à très bas niveau, ces métaux n'ayant pas été détectés dans les échantillons de la Dow Chemical Company.

CRAIG remarque "que la haute contenance en SR ( Strontium ) est très intéressante à constater puisque le SR n'est pas considéré comme une impureté habituelle dans la production du magnésium par les méthodes actuelles". Il a été constaté que le Laboratoire de la Chemical Company avait, en fait, produit des coulées expérimentales de magnésium contenant du Strontium, mais il n'était pas mentionné que ces échantillons contenaient du Baryum. CONDON a remarqué que "le métal était moins pur que le métal commercialisé en 1957 par la Dow Chemical Company... et donc, de ce fait, n'avait pas besoin d'une origine extra-terrestre.

Le chapitre "preuves physiques indirectes" a été revu par CRAIG ( CR 97-115 ). En présentant sa conclusion, il déclare ( CR 115 ) :

"De tous les effets physiques supposés dus à la présence d'un OVNI celui des pannes de moteurs est certainement le plus mystérieux. Cette constatation est parfois faite dans des rapports impressionnants en raison de la présence de multiples témoignages indépendants. Les témoins ont été certains que le fonctionnement de leur voiture était influencé par un objet non identifié, celui-ci n'étant visible qu'après la panne du moteur. Il n'y a pas d'explication satisfaisante possible, si cela s'est effectivement produit".

La discussion de cette preuve par CONDON et les autres membres du Projet, est très intéressante. L'argument est que dans le cas où les moteurs des voitures sont arrêtés, cela doit être attribué à un champ magnétique associé à l'OVNI ( CR 38, 101, 115, 380 ). Pour le seul cas étudié par le Projet, il a été déterminé que la voiture n'avait pas été exposée à un champ magnétique élevé. CRAIG ( CR 380 ) conclut : "le cas par conséquent, ne semble pas donner d'information probante concernant les OVNI". Nous reviendrons sur cet argument dans la Section V.

5. METHODOLOGIE SCIENTIFIQUE DU PROJET COLORADO

Le titre du Rapport CONDON est "ÉTUDE SCIENTIFIQUE DES OBJETS VOLANTS NON IDENTIFIES". La grande importance attachée à ce rapport par les scientifiques, par le public et peut-être aussi par les officiels du gouvernement fédéral, est due à la présomption que l'étude était faite scientifiquement. Cela a été de nombreuses fois contesté, entre autres par McDONALD ( 8 ) et HYNEK ( 4 ) qui ont critiqué la méthodologie employée. Ces critiques ne sont pas mentionnées ici. Les commentaires suivants sont de nature plus générale.

Qu'il existe ou non une "méthode scientifique" bien définie appliquée à tous les problèmes scientifiques, le fait est que les pratiques utilisées par les scientifiques varient d'un sujet à l'autre. L'accent a été mis à la Section II sur le fait que les physiciens cherchent une expérience remarquable qui à elle seule prouve ou nie la validité d'une hypothèse. Le fait que ce soit de cette façon que CONDON aborde l'information fournie par les membres du Projet, n'est pas surprenante. C'est aussi l'attitude des membres scientifiques, à quelques exceptions près. Par exemple, le paragraphe de CRAIG ( CR 115 ) concernant "les preuves physiques indirectes" récemment cité, reflète parfaitement le jugement basé sur une accumulation de preuves.

Le problème OVNI est probablement plus proche de l'astronomie que de la physique. Une seule observation de la position d'une seule planète n'établit pas la loi de KEPLER. Une seule observation concernant la position et la magnitude d'une étoile n'établit pas que le Soleil est dans une galaxie en forme de disque. Les données concernant une seule étoile ne confirment pas une théorie proposée sur évaluation stellaire. Dans une discussion des propositions astronomiques, l'essentiel est de combiner les évidences dérivées de plusieurs observations. L'importance des faits observés ne peut devenir significative que lorsqu'un très grand nombre d'observations sont combinées.

En suivant les pratiques astronomiques comme un guide, on peut penser qu'un grand pas dans l'étude scientifique des OVNI sera fait en établissant un catalogue spécifique d'OVNI. Cela aurait pour conséquence directe de ressortir l'information déjà accumulée ( dans la plupart des cas, avec beaucoup d'efforts et beaucoup de soins ) par d'autres organisations. Pour l'instant des groupes comme l'APRO ( Aerial Phenomena Research organization ) et le NICAP ( National Investigation Committee for Aerial Phenomena ) ont constitué de vastes dossiers sur les cas OVNI utilisant protection soigneuse et des techniques d'évaluation.

Il y a incontestablement un grand avantage à utiliser des données venant de sources différentes. Les données venant d'une seule source peuvent être considérées comme fausses ou partiellement fausses. Et la même considération peut être vraie pour des données venant d'une autre source. Si deux sources d'information ont un contenu différent et irréconciliable, on pourrait penser qu'au moins l'une d'elles a été biaisé et même, à l'occasion, délibérément faussée. Si l'une des sources provient d'une équipe scientifique on pourrait conclure que l'erreur réside dans l'autre groupe ou bien on pourrait choisir de vérifier soigneusement les méthodes utilisées par sa propre équipe.

D'un autre côté, des informations cohérentes provenant de plusieurs sources sont plus significatives que des données issues d'une source unique, mais pas plus que celles d'autres sources multiples. De fait, de solides données peuvent être obtenues en cataloguant les données venant de multiples sources d'informations, tout en notant dans le catalogue leur provenance.

Après classification et constitution d'un fichier pondéré, on peut commencer la comparaison des preuves et hypothèses ( un très bon exemple de cette procédure est la construction de diagrammes de HERTZSPRUNG-RUSSEL en astrophysique, diagramme qui est un test important pour toute théorie sur l'évolution des étoiles ). Ce procédé est complexe et demande une organisation soigneuse des travaux théoriques et de la réduction des données. Récemment, une procédure formelle a été proposée ( 9 ) en vue d'applications en astrophysique, pour organiser les appréciations multiples susceptibles d'intervenir au cours d'une démarche de recherche scientifique. Quelques uns des commentaires sur l'étude scientifique des OVNI sont basés sur cet article.

Afin d'estimer un phénomène, il est essentiel de filtrer les preuves disponibles. Le procédé clé de filtrage est représenté par la définition du phénomène. Dans cette optique, la définition de CONDON, déjà citée, a le défaut d'autoriser un très grand "bruit" dans le "signal" qui peut se trouver dans les données.

La plupart des gens étudiant le phénomène OVNI adoptent une définition plus restreinte. Tel le Pr HYNEK qui recommande "qu'un rapport OVNI" soit défini comme une "déclaration d'une ou plusieurs personnes, jugées responsables et psychologiquement normales selon les critères courants, décrivant une perception personnelle, visuelle ou instrumentale d'un objet ou d'une lumière dans le ciel, ou sur la terre et/ou ses effets physiques supposés, qui ne se rapporte à aucun phénomène physique, objet ou procédé, ou évènement ou processus d'ordre psychologique connu".

Néanmoins, la définition du phénomène est seulement un procédé de filtrage. En discutant les phénomènes complexes que sont les OVNI, elle doit être suivie par d'autres filtrages, comprenant la restriction sur les preuves admissibles, des structures de classification, etc... Les membres du Projet ont effectivement classé les preuves en catégories dans leurs résumés, mais c'est seulement un outil rudimentaire d'analyse.

Un autre point important d'une méthode scientifique est, dans le cas où quelqu'un émet une hypothèse ( par exemple, extra-terrestre ), de ne considérer cette hypothèse que comme un élément d'un ensemble d'hypothèses complètes et mutuellement exclusives. Ceci a été clairement reconnu par THAYER ( CR 116 ) mais apparemment ignoré par CONDON et les autres membres du Projet.

Finalement, en évaluant une hypothèse, on doit éviter les procédures de réduction des données, qui dépendent de la validité ou de la fausseté. En d'autre terme, on doit éviter les arguments liés à une théorie. Dans le cas où nous prenons l'hypothèse que le phénomène OVNI serait dû à une civilisation extrêmement avancée, nous devons accepter la possibilité que beaucoup d'idées, que nous acceptons comme une simple vérité, peuvent dans un contexte plus large et plus sophistiqué, ne pas être aussi simples que cela et même, pas conformes à notre conception.

Comme exemple spécifique, on peut attirer l'attention sur l'argument ( CR 143 ) qu'un OVNI supersonique doit produire un bang sonique. Cela est certainement vrai en ce qui concerne tout objet supersonique fabriqué par l'homme. Mais nous ne devons pas présumer qu'une civilisation plus avancée n'ait pas pu trouver un système capable de voyager à une vitesse supersonique sans produire un bang sonique.

Bien que ceci soit simple à formuler, ce n'est certainement pas simple à mettre en oeuvre. Il peut être nécessaire de procéder par essais et échecs : chaque fois que l'on tombe dans une impasse, une situation où les données établies sont incompatibles avec toutes les hypothèses considérées ( y compris l'hypothèse extra-terrestre - HET - ), on doit réexaminer le procédé de réduction des données. Il pourrait se faire que l'abandon d'une hypothèse implicite permette de réconcilier les données avec au moins une des hypothèses explicites.

Un autre exemple de ce genre de situation, est la discussion concernant les pannes de voitures et les défaillances de leurs phares" ( voir CRAIG - CR 100-108 ) présentée en Section IV.

Nous avons noté la position prise par CONDON et les autres membres du Projet disant que le fait que des voitures s'arrêtent serait dû à un champ magnétique associé aux OVNI. Apparemment, CONDON et les autres membres du Projet ne prennent pas en considération la possibilité d'une civilisation avancée qu i puisse connaître ou utiliser des méthodes physiques inconnues de nous. Cependant, cette possibilité est sûrement la raison la plus intrigante qui pourrait inciter les scientifiques à étudier le phénomène OVNI. La discussion du bang sonique et du fonctionnement des moteurs de voiture par l'équipe Condon fournit deux excellents exemples d'arguments liés à une théorie.

6. DISCUSSION

L'évaluation des preuves par catégories, présentée à la Section IV, montre que chaque résumé présenté par les membres est un honnête et prudent résumé du matériau correspondant. Par contre le résumé de CONDON ne présente pas une vue exacte des données d'observation. La faiblesse du Projet est donc que l'effort de beaucoup d'individus ne s'est pas trouvé intégré de façon satisfaisante.

Cet échec peut être dû à une conception initiale erronée du phénomène. Si, comme l'avait cru le Directeur, le phénomène pouvait être traité comme un problème des Sciences physiques, il y avait maintenant peu de désaccord parmi les scientifiques en ce qui concerne la valeur et les conclusions du Rapport. Le phénomène OVNI se présente davantage comme un de ces phénomènes énigmatiques de l'astronomie moderne, tels les quasars.

Concernant les objets étranges, nous ne sommes pas certains de ce qu'ils sont, d'où ils viennent, ni de leur mode de fonctionnement. Concernant les OVNI, nous ne savons pas si cela est canular, illusion ou vérité. S'ils ont une réalité, nous ne savons pas si elle est de nature psychologique et sociologique ou si elle est située dans le cadre physique. Si le phénomène a des réalités physiques, nous ne savons pas si elles doivent être comprises dans la physique d'aujourd'hui ou ( comme les quasars ) si elles peuvent prétendre appartenir à la physique du 25ème ( ou du 30ème ) siècle. Si nous sommes confrontés à un problème de cette grandeur, il est capital de faire très attention à la méthodologie scientifique de l'étude.

En somme, mon opinion est que la faiblesse du Rapport Condon est une conséquence compréhensible mais regrettable de la mauvaise appréciation de la nature et de la subtilité du phénomène. Mon opinion est également que le Rapport Condon présente un élément convaincant renforçant le point de vue qu'il n'y a un feu phénoménologique caché derrière la fumée des rapports OVNI et pour cela, le rapport suggère qu'une étude scientifique poussée sur les OVNI est nécessaire.

Il s'avère que cette opinion est en fait partagée par certains membres du Projet Colorado. Pour l'instant, le Pr David E. SAUNDERS qui quitta le Projet dans des circonstances malheureuses, a publié un livre ( 10 ) mettant en doute les découvertes du Rapport Condon. Gordon D. THAYER a lui aussi montré son intérêt pour le phénomène, en préparant un rapport sur le cas Lakenheath pour le journal "Astronautics & Aeronautics".

En conclusion, il est nécessaire de commenter brièvement le point de vue de l'Académie des Sciences sur le Rapport Condon. Ce groupe distingué a examiné et entièrement approuvé les méthodes, découvertes et portées du Rapport. Dans la Section IV, nous avons noté les désaccords sur des faits et vues avancées par les membres du Projet Colorado et ceux du Directeur. En les comparant au point de vue de l'Académie des Sciences, il est clair que les informations ont été prises dans le Résumé de l'étude du Directeur, malgré la contradiction avec le matériau trouvé dans les Sections CR III et IV du Rapport. Par exemple, en ce qui concerne les cas photographiques l'Académie déclare que "35 cas photographiques ont été étudiés... et aucun n'était compatible avec le fait d'être un véritable objet à haute étrangeté".

Ceci est entièrement compatible avec les discussions de CONDON, dans la Section CR II du Rapport, mais comme nous l'avons vu dans la Section III, l'argument de CONDON n'est pas compatible avec le matériel présenté pour l'analyse photographique par HARTMANN. En particulier, HARTMANN étudiait 14 cas et non 35, et dans son résumé ( CR 86 ), HARTMANN déclare "Après enquête, il reste un petit nombre de cas ( de l'ordre de 2 % ) qui suggèrent des objets volants correctement observés mais non identifiés ou non identifiables... ( c'est à dire des OVNI )".

Le Rapport Condon a été récemment étudié par le Sous-Comité de l'Institut Américain d'Aéronautique et d'Astronautique ( AIAA ), investit des problèmes OVNI ( 5 ). Celui-ci a déclaré : "toutes les conclusions que l'on trouve dans le Rapport lui-même, ne sont pas reflétées dans le résumé de CONDON".

La recommandation la plus importante de CONDON est celle qui concerne les activités futures. Il déclare ( CR I ) : "une étude plus poussée des OVNI ne peut probablement pas se justifier par l'espoir de faire aussi avancer la Science". L'Académie des Sciences a approuvé ces déclarations. D'un autre côté, le Sous-Comité de l'AIAA ne "trouva rien dans ce Rapport permettant de fonder cette prédiction que rien de scientifique ne pourrait sortir d'études plus poussées.

Le Comité de l'Académie des Sciences, mis en place fin octobre et début novembre 1968, commença à examiner le Rapport le 15 novembre 1968. Le Comité décida le 2 décembre et à nouveau le 6 janvier 1969, de conclure ses délibérations et de préparer ses conclusions. Sept semaines est un laps de temps très court pour examiner un Rapport sur un sujet qui était, à tous les membres du Comité, peu familier. Cela est d'autant plus vrai qu'il y a contradiction entre ce Rapport et ses résumés, chose que les lecteurs ne savaient probablement pas. Par contre, le point de vue du Sous-Comité de l'AIAA fut rédigé fin 1970, laissant plus de temps pour apprécier les subtilités du problème et digérer l'ensemble du Rapport.

Cette analyse du Rapport Condon et ma rapide appréciation sur les points de vue de l'Académie des Sciences et du Sous-Comité de l'AIAA, soulèvent quelques doutes sur ce que l'on trouve dans le Rapport et les opinions du Directeur. La remarque suivante, faite par CONDON lui-même ( CR II ) montre que ce désaccord était prévu d'avance. Il dit :

"Les scientifiques ne respectent pas l'autorité. Notre conclusion que l'étude sur les OVNI risque de ne pas faire avancer la Science ne sera pas acceptée par eux sans critique. Cela ne doit pas être et nous ne souhaitons pas que cela soit. Pour les scientifiques, notre espoir est que la présentation de l'analyse détaillée de ce que nous avons été capables de faire et de ce que nous n'avons pas pu faire, puisse aider à décider s'ils acceptent ou refusent nos conclusions. Notre espoir est que le détail de ce Rapport puisse aider les autres scientifiques à voir quels sont les problèmes et les difficultés qu'ils soulèvent".

 

REFERENCES

  1. ABELSON, P. H. (1974 )
    "Pseudoscience", Science, Vol. 184, p. 1233

  2. CONDON, E.U. (1968) - D.S. GILLMOR (1968)
    Project Director, and Editor
    "Scientific Study of Unidentified Flying Objects", Bantam Books, N. Y.

  3. Symposium on Unidentified Flying Objects : Hearings before the Committee on Science and Astronautics, U.S. House of Representatives, Ninetieth Congress, second Session, July 29, 1968 ( US Government Printing Office, Washington, 1968 )

  4. HYNEK J.A. (1972)
    "The UFO Experience - A Scientific Study", Henry Regnery Company, Chicago

  5. KUETTNER, J. P. et al (1970)
    "UFO : an Appraisal of the problem", Astronautics and Aeronautics, Vol. 8, n°11, pp. 49-51

  6. McDONALD, J. E. (1971)
    "UFO Encounter n°1" Aeronautics and Astronautics, Vol. 9, n°7, pp. 66-70

  7. THAYER, G. D. (1971)
    "UFO Encounter n°2" Aeronautics and Astronautics, Vol. 9, n° 9, pp. 60-64

  8. McDONALD, J. E. (1969)
    Review of the Condon Report, Icarus, vol. II, pp. 443-447

  9. STURROCK, P.A. (1973)
    "Evaluation of Astrophysical Hypotheses", Astrophysical Journal, Vol. 182, pp. 569-580

  10. SAUNDERS, D. R. & HAWKINS R. R. (1968)
    "UFO ? YES ! " New American Library, N. Y.




FIN




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