CENTRE NATIONAL D'ETUDES SPATIALES
Groupe d'Etudes des Phénomènes Aérospatiaux Non-identifiés
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Toulouse, le 29 septembre 1981 N° 236 CT/GEPAN
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NOTE D'INFORMATION N°4
Les études de Phénomènes Aérospatiaux Non-identifiés aux Etats-Unis
3ème Partie : "La fin des recherches officielles"
AVERTISSEMENT
Les Notes d'informations sont généralement constituées de documents et de comptes rendus de travaux
auxquels le GEPAN n'a pas participé. Le GEPAN a alors seulement choisi de les publier en raison de leur importance
historique ou théorique, pour une bonne connaissance et compréhension du problème des phénomènes aérospatiaux
non identifiés. Cependant, cette décision de publication ne signifie en rien que le GEPAN s'associe aux idées,
théories ou conclusions présentées dans ces textes. Elles restent sous la responsabilité exclusive de leurs auteurs.
C'est dans les Notes Techniques que le GEPAN fournit les informations relatives à ses propres activités.
TABLE DE MATIERES
LES ÉTUDES DES PHÉNOMÈNES AÉROSPATIAUX NON IDENTIFIÉS AUX ETATS-UNIS
3e PARTIE : LA FIN DES RECHERCHES OFFICIELLES
menée par l'Université du Colorado
sous le Contrat de Recherche F44 620-67-L-0035
de l'U.S. AIR FORCE
CONCLUSIONS ET RECOMMANDATIONS
Par Edward U. Condon
Nous pensons que les dossiers existants et les résultats de l'Etude scientifique des objets
volants non identifiés de l'Université du Colorado, qui sont présentés en détail dans les
sections suivantes de ce rapport, appuient les conclusions et recommandations que voici :
Comme l'indique le titre, l'effort de cette étude a porté sur la recherche de ce qui pourrait, à
partir des rapports d'OVNI, être considéré comme un apport nouveau à la connaissance
scientifique. Notre conclusion générale est que rien n'est venu au cours des 21 dernières
années d'étude des OVNI, qui accroisse la connaissance scientifique. L'étude soigneuse du
dossier auquel nous avons eu accès, nous amène à conclure que de futures études
générales des OVNI ne seraient probablement pas justifiées par l'espoir de faire ainsi
progresser la science.
On a dit que ce manque de contribution à la science est dû au fait que très peu de
scientifiques ont travaillé sur le sujet. Nous ne sommes pas d'accord. Nous pensons que la
raison pour laquelle il y a eu si peu d'études scientifiques sur le sujet est que les
scientifiques qui sont les premiers concernés ( astronomes, physiciens de l'atmosphère,
chimistes et psychologues ) qui ont eu amplement l'occasion d'examiner le dossier, ont
considéré individuellement que le phénomène OVNI ne constitue pas un domaine favorable
à des découvertes scientifiques majeures.
Cette conclusion est si importante et le public semble en général si peu au fait de ce qu'est
la méthode scientifique que quelques commentaires semblent souhaitables. Tous ceux qui
entreprennent de faire carrière dans la recherche scientifique choisissent un domaine
général à larges spécialités pour y acquérir leur compétence. Dans ce domaine, ils
cherchent un domaine spécifique d'étude. Dans ce but, ils s'informent des publications
scientifiques, assistent à des rencontres scientifiques, où on rend compte des progrès
récents, et discutent énergiquement leurs sujets d'élection et ceux de leurs collègues, à la
fois oralement et par courrier. Ils sont mus par une curiosité active envers la nature et par
leur désir personnel d'apporter une contribution à la Science. Ils sont constamment à l'affût
d'erreurs ou de lacunes dans les efforts développés dans le domaine qui les intéresse, et
cherchent de nouvelles idées sur de nouvelles manières d'attaquer de nouveaux
problèmes. Ceci les amène à décider où leur effort personnel pourrait être le plus fructueux.
Cette décision est personnelle car ils doivent estimer leurs propres limites intellectuelles, et
celles inhérentes aux conditions de travail dans lesquelles ils se trouvent, y compris les
limites dans le soutien à leur travail ou leurs implications dans d'autres démarches
scientifiques. Bien que des erreurs de jugement puissent survenir, il n'est pas vrai en
général que tous les scientifiques qui étudient un même domaine scientifique puissent se
tromper pendant longtemps.
Même, en, admettant que tous les tenants de la science "officielle" puissent se tromper à
un moment donné, nous pensons que le meilleur moyen de corriger l'erreur est de donner
libre cours aux idées des différents scientifiques pour décider dans quelle direction le
progrès scientifique a les meilleures chances d'intervenir. Pour les affaires judiciaires, les
personnes sensées cherchent un avocat, pour les traitements médicaux, elles cherchent un
médecin. La meilleure garantie que la nation puisse trouver pour les questions
scientifiques, est de laisser la décision se faire à partir des jugements individuels et
collectifs des scientifiques.
Les scientifiques ne sont pas respectueux de l'autorité, notre conclusion, que l'étude des
OVNI a peu de chances de faire avancer la science, ne sera pas acceptée sans critiques
de leur part. Cela ne devrait pas être et nous ne souhaitons pas que cela soit. En tant que
scientifiques, nous espérons que la présentation analytique détaillée de ce que nous avons
pu faire et de ce que nous n'avons pas pu faire les aidera à décider s'ils sont d'accord ou
non avec nos conclusions. Nous espérons que le détail de ce rapport aidera d'autres
scientifiques à voir quels sont les problèmes et les difficultés pour en venir à bout.
S'ils sont d'accord avec nos conclusions, ils porteront ailleurs leurs efforts et leurs talents.
S'ils ne sont pas d'accord, c'est que notre rapport les aura aidés à se faire une idée claire
de ce en quoi nos études sont erronées ou incomplètes et aura donc stimulé les idées en
vue d'études plus précises. S'ils ont de telles idées et peuvent les formuler clairement nous
ne doutons pas qu'elles seront soutenues pour mettre en oeuvre des études spécifiques et
clairement définies. Nous pensons que de telles idées de travail doivent être soutenues.
Certains lecteurs pourraient penser que nous nous engageons là dans une contradiction.
Nous disions précédemment que nous ne pensions pas que l'étude des OVNI pouvait être
une direction fructueuse pour le progrès scientifique ; maintenant, nous disons que les
personnes ayant des idées claires en vue d'études déterminées devraient être soutenues.
Ce n'est pas contradictoire. Bien qu'après deux années d'études intensives, nous
concluions que nous ne voyons pas de directions prometteuses venir de l'étude des OVNI,
nous pensons que tout scientifique, nanti de la formation et la compétence requises, qui
présente un programme d'études déterminé et clairement défini devrait être soutenu.
Ce que nous disons là a déjà été énoncé dans un contexte plus général il y a un siècle par
William Kingdom Clifford, un grand spécialiste anglais de la Physique mathématique. Dans
ses "But et Instruments de la Pensée scientifique", il s'exprime ainsi :
"Souviens-toi donc que la pensée scientifique est un guide pour l'action ; que la vérité
qu'elle permet d'atteindre n'est pas de celle que nous pouvons contempler idéalement sans
erreur, mais celle qui nous permet d'agir sans peine ; et nous ne pouvons manquer de voir
que la pensée scientifique n'est pas un accompagnement ou une condition du progrès
humain, mais le progrès humain lui-même".
De même qu'un scientifique peut faire une erreur, quant à l'orientation la plus fructueuse
pour ses recherches, de même un administrateur ou un comité, ayant la responsabilité du
choix des supports financiers à des propositions de recherches, peut aussi faire des erreurs
de jugement. Cette possibilité est minimisée par l'existence de circuits parallèles, en vue de
l'examen par plusieurs groupes des propositions de programmes de recherche. Depuis
1945, le Gouvernement fédéral a mis en oeuvre un système souple et efficace pour
examiner soigneusement les propositions venant de scientifiques réellement qualifiés. Ce
qui peut sembler être un système redondant est en effet, un garde-fou contre les erreurs
qui pourraient provenir d'un système officiel unique. Même ainsi, des erreurs peuvent
s'introduire mais la probabilité en est réduite presque à zéro.
C'est pourquoi nous pensons que toutes les agences du Gouvernement fédéral de même
que les Fondations privées, devraient considérer les propositions de recherche sur les
OVNI sur le même plan que les autres qui leur sont soumises sur la base d'un esprit ouvert,
hors de tout préjugé. Bien que nous ne pensions pas maintenant que rien de valable puisse
venir de telles recherches chaque proposition particulière doit être considérée avec
attention selon ses propres mérites.
Cette formulation implique en corollaire que nous ne pensons pas que le Gouvernement
fédéral devrait à l'heure actuelle créer, comme certains l'ont suggéré, un service nouveau
et important pour l'étude scientifique des OVNI. Cette conclusion peut ne plus être valable
dans l'avenir. Si, par le progrès des recherches fondées sur de nouvelles idées dans ce
domaine, il semblait intéressant de créer une telle agence, la décision devrait en être prise
en temps opportun.
Nous pensons qu'il y a de larges domaines de l'optique atmosphérique, y compris la
propagation des ondes radio, et de l'électricité atmosphérique dans lesquels les
connaissances actuelles sont très incomplètes. Ces sujets se sont imposés à nous à
l'occasion de l'interprétation de certains rapports d'OVNI, mais ils sont aussi d'intérêt
scientifique fondamental et concernent des problèmes pratiques liés à l'amélioration de la
sécurité des vols civils et militaires.
Des efforts de recherche dans ces domaines sont menés par le "département of Defense"
le "Environmental Science Service Administration", le "National Aeronautics and Space
Administration", et par des universités et des organismes de recherche à but non lucratif tel
que le National Center for Atmosphéric Research, dont le travail est financé par la "National
Science Foundation". Nous recommandons ces efforts. Notre manque d'enthousiasme pour
l'étude des OVNI ne doit en aucune manière être interprété à tort comme une réticence à
ce que ces importants domaines de recherche scientifique soient soutenus dans l'avenir. A
une époque de développement majeur de transport aérien, de l'exploration de l'espace et
des activités aérospatiales militaires, tout doit être mis en oeuvre pour améliorer nos
connaissances de bases sur tous les phénomènes atmosphériques, et améliorer
l'entraînement des astronautes et pilotes de l'air à reconnaître et comprendre de tels
phénomènes.
Comme le lecteur de ce rapport pourra aisément en juger, nous avons fait porter notre
effort presque uniquement sur les sciences physiques. Cela vient d'une part d'un choix de
priorités, d'autre part, du fait que nous avons trouvé moins que certaines personnes
pouvaient l'attendre, de rapports entre des problèmes psychiatriques et la croyance en la
réalité des OVNI en tant que véhicules venus de civilisations lointaines de notre galaxie ou
intergalactiques. Nous croyons que l'étude rigoureuse de ces croyances - pour lesquelles il
n'y a aucune preuve valable - partagée par des individus ou même des groupes, pourrait se
montrer d'un intérêt scientifique pour les sciences sociales ou les sciences du
comportement. Il n'y a pas d'indications ici que la psychopathologie individuelle ou de
groupe soit un domaine majeur d'étude. Les témoignages d'OVNI présentent un problème
intéressant à qui étudie les processus de connaissance car ils font intervenir des variables
individuelles et sociales. Par ce biais, nous concluons qu'une analyse de contenu de
l'information sur les témoignages d'OVNI à travers la presse et la télévision pourrait
conduire à des données intéressantes tant pour le spécialiste des communications que de
sciences sociales.
L'absence d'une telle étude dans le présent rapport vient de notre opinion qu'il y avait des
domaines d'études à priorités beaucoup plus élevées. Nous ne suggérons pas cependant
que le phénomène OVNI serait par nature plus propice aux études dans ces disciplines que
dans les sciences physiques. Au contraire, nous concluons à la même nécessité de
spécificité pour des projets de recherche dans ces disciplines que dans les sciences
physiques.
Reste la question de savoir ce que devrait faire le Gouvernement fédéral, s'il doit faire
quelque chose, à partir de témoignages d'observation d'OVNI qu'il reçoit du large public.
Nous avons tendance à penser que rien ne devrait être fait avec ces témoignages dans
l'espoir de contribuer aux progrès scientifiques. Cette question est inséparable de celle de
l'intérêt de ces témoignages pour la défense nationale. L'histoire de ces dernières
21 années a constamment conduit les officiers de l'Air Force à conclure que rien de ce qui
est vu ou présumé vu, et porte le nom de témoignage d'OVNI, ne constitue un danger ou
une menace pour la sécurité nationale.
Nous avons pensé qu'il n'était pas de notre ressort d'essayer de porter un jugement
indépendant sur cette conclusion. Sans essayer de porter de responsabilité dans la
Défense qui relève de l'Air Force, nous avons estimé que s'il nous apparaissait une preuve
quelconque qui nous suggèrerait un danger en Défense, nous le signalerions
immédiatement à l'Air Force. Nous n'avons trouvé aucune preuve de ce genre. Nous
n'avons aucune raison de mettre en doute la position de l'Air Force puisque l'ensemble des
témoignages d'OVNI recueillis jusqu'ici, ne pose pas de problèmes de Défense.
Dans le même temps, toutefois, le fondement d'une telle opinion est dans l'examen attentif
des rapports de témoignage, un par un, qui nous parvenaient. Si un seul d'entre eux avait
été négligé, nous ne pourrions avoir pleinement confiance en cette conclusion. Par
conséquent, il semble que l'attention ne devrait être portée à ce sujet que pour autant que
la Défense le juge nécessaire d'un strict point de vue de sécurité. L'effort ne devrait pas
être accru sous prétexte de l'importance scientifique du sujet, au vu du dossier actuel.
Notre impression est que la fonction de défense devrait être assurée dans le cadre des
structures établies de renseignement et de surveillance sans le maintien d'une unité
spéciale comme le "Blue Blook", mais c'est là une question pour les spécialistes de la
défense plus que pour des chercheurs scientifiques.
On a affirmé que le sujet était couvert par le secret officiel. Nous concluons différemment.
Nous n'avons aucune preuve de secret concernant les témoignages d'OVNI. Ce que l'on a
inopportunément appelé secret n'a été rien d'autre qu'une politique intelligente de délais
dans la publication de l'information de façon que le public ne soit pas troublé par la
publication prématurée d'études incomplètes des rapports.
Le problème des OVNI a été très largement mal présenté au public par un petit nombre de
personnes qui en ont donné une image sensationnelle dans leurs écrits et leurs
conférences. Jusqu'ici, pour autant que nous puissions en juger, peu de personnes ont été
trompées par ce comportement irresponsable, mais quoi qu'il en soit, ceci est déplorable.
Un problème annexe que nous souhaitons signaler à l'attention du public est un défaut
d'éducation dans nos écoles qui vient du fait que beaucoup d'enfants sont autorisés, si ce
n'est encouragés activement, à lire, dans le cadre de leurs études scientifiques, les livres et
articles de magazine consacrés aux OVNI, du type cité au paragraphe précédent. Nous
pensons que les enfants sont handicapés dans leur éducation par l'étude de données
malsaines et erronées comme si elles étaient scientifiquement fondées. Une telle étude est
nuisible, non seulement à cause de la nature erronée de son contenu, mais aussi, parce
qu'elle retarde le développement de l'esprit critique vis-à-vis de la preuve scientifique, ce
qui dans une certaine mesure devrait faire partie de l'éducation de tout américain.
Par conséquent, nous recommandons vivement aux enseignants d'éviter de donner à leurs
étudiants des "points" pour leurs travaux à partir des livres et articles de magazine
actuellement disponible sur les OVNI. Les enseignants dont les étudiants sont fortement
motivés par ce sujet, devraient essayer de canaliser leur intérêt vers des études sérieuses
en astronomie et météorologie et vers l'analyse critique de l'argumentation des propositions
fantastiques qui s'appuient sur l'utilisation de raisonnements fallacieux et de données
erronées.
Nous espérons que les résultats de cette étude seront utiles aux scientifiques et aux
responsables politiques pour ce qui concerne ce problème que nous connaissons depuis
21 ans.
SUITE...
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