CENTRE NATIONAL D'ETUDES SPATIALESGroupe d'Etudes des Phénomènes Aérospatiaux Non-identifiés
NOTE TECHNIQUE |
A | B | autre | total | |
Groupe neutre | 113 | 38 | 4 | 155 |
Groupe expérimental | 35 | 16 | 1 | 52 |
Cette différence n'est pas significative d'un point de vue statistique. Le test de la comparaison de deux proportions indique une valeur observée de .825 ( p > .40 ).
ITEM DE :
Pour cet item la différence entre les deux groupes est plus prononcée ( 77 % contre 62 % ), le
groupe expérimental choisissant plus la photo E que le groupe neutre :
D | E | autre | total | |
Groupe neutre | 46 | 96 | 13 | 155 |
Groupe expérimental | 10 | 40 | 2 | 52 |
Cette différence est significative d'un point de vue statistique ( valeur observée 1,98, p < .05 ).
ITEM C :
Le tableau des réponses ne fait apparaître que deux légères différences, au niveau des
choix 10 et 100 m ( 22 % contre 8 % et 20 % contre 29 % respectivement ).
Ces différences ne sont pas significatives statistiquement ( valeurs observées : 1,42 et 1,22 respectivement,
p > .15 et p > .20 ).
10 | 100 | 500 | km | autre | total | |
Groupe neutre | 24 | 32 | 41 | 51 | 1 | 155 |
Groupe expérimental | 4 | 15 | 13 | 20 | 0 | 52 |
Un autre type de traitement souligne la signification des différences venant d'être signalées.
Les questionnaires remplis par les visiteurs ont été traités, dans un premier temps, en deux échantillons différents correspondant à deux périodes de l'exposition du Bourget. Les tailles de ces échantillons sont de 105 et 161 sujets. A l'intérieur de chaque échantillon, les tailles relatives des sous-groupes neutres et expérimentaux sont sensiblement les mêmes : 60 et 95 ( neutres ) et 20 et 32 ( expérimentaux ) respectivement.
La comparaison des réponses aux premiers items en fonction des sous-groupes fait apparaître exactement les mêmes différences que celles venant d'être citées.
Sans que cela constitue en soi une preuve statistique, ce fait montre que les différences constatées sont difficilement attribuables à un simple fait du hasard. Les différences remarquées au niveau de l'ensemble traité, bien que légères, sont le fruit des mêmes différences existant au niveau des sous-ensembles. Une position économique pousse à penser que ces différences indiquent plutôt une tendance générale qu'un produit du hasard.
3.7. - DISCUSSION
Les hypothèses qui dirigeaient les items AB et DE, même si elles sortent d'un cadre théorique commun, font appel à deux tendances assez différentes, our apprécier la distance, l'une d'elle utilise des indices tirés de l'environnement du stimulus sans qu'aucune interprétation n'intervienne.
L'autre tendance rajoute au stimulus une signification permettant d'utiliser les données projectives réelles pour apprécier, par exemple, la distance. Ainsi, attribuer une taille permet d'estimer la distance à partir de la taille angulaire, grâce aux lois de constance ( cf. chapitre 1 ). Nous avons résumé ces deux tendances sous les noms de l'utilisation d'indices extrinsèques ou intrinsèques subjectifs.
Il est alors sensé de penser que les indices intrinsèques subjectifs doivent être utilisés plus largement par les sujets qui, de façon générale, attribuent à un stimulus ambigu une signification subjective.
Inversement on peut penser que ces sujets utiliseront moins les indices extrinsèques, dans la mesure où cela va de pair avec une plus grande austérité dans la signification attribuée au stimulus.
Ces hypothèses particulières peuvent être rendues opérationnelles dans notre sondage si on considère que l'item FG permet de cerner un groupe de sujets se rapprochant de ceux qui viennent d'être invoqués. Il s'agit du groupe que nous avons appelé expérimental. A l'opposé l'autre groupe peut être considéré comme "neutre" pour les raisons déjà signalées.
Sans revenir sur le degré de signification des résultats, il est important de rappeler que ceux- ci n'infirment pas les hypothèses particulières : le phénomène E est considéré comme le plus éloigné, proportionnellement plus par le groupe expérimental que par le groupe neutre ; le phénomène A est considéré comme le plus proche proportionnellement moins par le groupe expérimental que par le groupe neutre.
A l'intérieur du cadre théorique, cela traduit une tendance générale des sujets, attribuant des significations subjectives, à utiliser particulièrement plus les indices intrinsèques et à utiliser particulièrement moins les indices extrinsèques.
Les différences constatées au niveau de l'item C sont d'une explication moins aisée. Les indices extrinsèques fournissent un large choix de distances : celles de la voiture de plusieurs crêtes situées en profondeur, de la colline qui est au fond de la photographie. La distance vraie du phénomène ( # 100 m ) peut, peut-être, apparaître réellement dans le montage.
En outre, un simple calcul indique qu'une distance apparente de 100 m va de pair avec une taille métrique apparente de 4 ou 5 m. On rappelle que la taille moyenne attribuée à un PAN se situe entre 3 et 15 m ( POHER, 1971 ).
Au stade actuel de la recherche on ne peut que poser la question de savoir si cette taille moyenne est passée dans les moeurs au point de constituer la taille stéréotypée d'un OVNI.
Comment comprendre le choix relativement privilégié par le groupe expérimental de la distance de 100 m ? L'attribution éventuelle d'une signification d'OVNI au phénomène représenté nous paraît une piste d'explication plus simple qu'un sens aigu distances, par exemple. Cette piste va de pair avec le jugement porté sur la photo F, et avec la réticence à choisir la distance de 10 m ( cette dernière correspond à une taille métrique apparente de 40 ou 50 cm ).
3.8. - CONCLUSION
Une recherche n'a de sens que dans le cadre théorique où elle s'inscrit. Elle doit l'illustrer ou répondre à une question spécifique ou généraliser un résultat particulier.
Le sondage qui est présenté ici, n'est pas à l'abri d'une multitude de critiques méthodologiques, il serait naïf de notre part de prétendre qu'il constitue une recherche scientifique.
Sa valeur est toute autre. Il se situe dans ce terrain inconfortable à la lisière entre la situation parfaitement contrôlée en laboratoire et l'observation invoquée dans la vie de tous les jours. Il permet simplement de fortifier un modèle théorique et les choix du GEPAN en matière de recherche sur la perception.
Les résultats nous confirment dans l'hypothèse que l'attitude du témoin et en particulier la signification qu'il attribue à un stimulus sont pertinentes pour comprendre les caractéristiques physiques décrites dans un témoignage.
Les résultats vont dans le sens de l'hypothèse que le sujet juge la distance d'un stimulus en fonction d'indices qui ne sont pas ceux de la distance réelle. Ces indices semblent se pondérer différemment par rapport à l'attitude plus ou moins subjective du témoin.
4. – EXPERIENCE B
4.1. – INTRODUCTION
Dans l'expérience A, nous avons observé de faibles différences entre les sujets ayant des attentes d'OVNI ( décelées opérationnellement par la dénomination OVNI ) et ceux qui n'en manifestent pas. Les premiers utilisent moins les indices extrinsèques et plus les indices subjectifs que les deuxièmes.
La faiblesse des différences observées eut être due par exemple au caractère indirect de la mesure de la variable indépendante ( l'attente, la dénomination ), faite sur un stimulus différent ( photo F ) de ceux qui fournissent la variable dépendante ( photos A et B, D et E ; la distance relative ).
En outre, le protocole, cherchant principalement à mettre en évidence l'utilisation des indices extrinsèques, surdéterminait ceux-ci.
Dans l'expérience B, nous avons testé directement l'hypothèse du rapport entre les attentes ( manifestées au niveau de la dénomination ) et les caractéristiques descriptives. Cette fois ci, les variables opérationnelles indépendantes et dépendantes ( dénomination et description ) portent sur le même stimulus.
Les caractéristiques demandées sont plus larges : elles comportent une question surdéterminée par les indices extrinsèques et deux questions surdéterminées par les indices subjectifs.
4.2. - PROTOCOLE EXPÉRIMENTAL
La situation expérimentale comprend la présentation de trois diapositives, fabriquées de façon analogue à celles présentées dans l'expérience A.
Chaque diapositive représente un phénomène lumineux diffus situé sur l'horizon virtuel d'un paysage montagneux. La taille angulaire des phénomènes est de 1,65°, 1,65° et 4,35° respectivement. Les diapositives sont présentées à l'aide d'une visionneuse, individuellement et toujours dans le même ordre. L'échantillon comprend vingt sujets de 20 à 30 ans des deux sexes et de professions diverses ( 1 ).
(1) Deux consignes de présentation légèrement différentes ont été utilisées. Les résultats observés ne permettent pas de diviser l'échantillon en fonction des consignes.
Pendant la présentation de chacune des diapositives, il est demandé au sujet de répondre à quatre questions. La première porte sur l'identité du phénomène ( "que voyez-vous ?" ), les trois suivantes sur : la position relative du phénomène par rapport au paysage, la distance et la taille absolues du phénomène.
4.3. - HYPOTHESES
L'hypothèse générale est la première signalée au début du présent chapitre : "la probabilité que la subjectivité intervienne dans un témoignage ( de PAN ) croit avec l'attente de phénomène OVNI".
Elle se traduit dans le cas présent par "les attentes du phénomène OVNI décelées par la dénomination OVNI donnée au stimulus, sont accompagnées par des distorsions, dans la description, plus grandes que celles observées avec un groupe contrôle ne manifestant pas d'attentes particulières".
Il est possible de passer des réponses fournies aux variables théoriques. Ainsi la première question ( "que voyez-vous ?" ) permet de diviser les sujets, pour chaque diapositive, en deux groupes : le groupe expérimental est formé par les sujets qui répondent "OVNI" ou une dénomination analogue ( 1 ), les autres sujets constituant le groupe contrôle ; dans la pratique, ces derniers fournissent des réponses ambiguës, traduisant des attentes faibles. Bien entendu, la situation se présentant de façon indépendante pour chaque diapositive, il s'ensuit qu'un même sujet pourra faire partie du groupe expérimental pour certaines diapositives et du groupe de contrôle pour les autres. Cette question correspondant à la variable théorique des "attentes" ; c'est la variable indépendante de l'expérience.
(1) Soucoupe volante, etc.
Par contre, les réponses aux questions descriptibles ( distance, taille... ) constituent les variables dépendantes.
L'hypothèse expérimentale met en relation la dénomination d'une diapositive avec les caractéristiques descriptives qui lui sont attribuées, cette relation dévoile le rapport entre l'attente d'un sujet et sa perception du stimulus.
Toutefois, comme les phénomènes représentés n'ont pas des distances ou des tailles objectives le sujet ne peut utiliser que les indices extrinsèques paysage ou les indices subjectifs. Les acquis de l'expérience A nous permettent alors d'attendre des différences plus grandes pour les questions 3 et 4 ( distance et taille absolues ) que pour la question 2 ( taille relative ).
Cependant, en combinant les réponses 3 et 4, nous pouvons accéder à une réponse implicite, la taille angulaire, qui a un référent réel dans le stimulus.
Ce référent peut être un troisième indice ( intrinsèque objectif ). De quelle façon le modèle théorique prédit le comportement perceptif de l'un et l'autre groupe des sujets ? Il est sensé de penser que les trois types d'indices sont en interaction irréductible, cependant le groupe neutre utilisera de préférence les indices extrinsèques ( 2 ) et objectifs, alors que les attentes du groupe expérimental vont de pair avec une préférence pour les indices subjectifs et intrinsèques.
(2) Nous renvoyons au cadre théorique psychophysique présenté lors de l'expérience A.
La taille angulaire apparente implicite constitue la variable dépendante pouvant être comparée au stimulus, et permettant ainsi de déceler, par ses écarts, la manifestation des indices objectifs et subjectifs.
4.4. - ANALYSE DES RÉSULTATS
DENOMINATION ( Question 1 )
Sur un total de 20 sujets, 3 désignent les trois stimuli en tant qu'OVNI, 4 autres sujets, désignent ainsi les deux premiers, 1 seul ne désigne que le premier stimulus.
Les groupes sont composés donc de 8/12 sujets pour la première diapositive, 7/13 et 3/17 pour la deuxième et la troisième, respectivement. ( Quelques sujets n'ont pas répondu à certaines des questions 2, 3 et 4. La plupart de ces non-réponses émane des groupes neutres et des questions 3 et 4 ).
DISTANCE RELATIVE ( Question 2 )
D'une façon générale, les groupes expérimentaux situent les phénomènes moins en avant, par rapport au paysage, que les groupes neutres. Mais l'analyse statistique ne permet pas de penser que ces différences sont significatives ( chi-deux, p > .10 ).
DISTANCE ABSOLUE ( Question 3 )
D'une façon générale, les groupes expérimentaux situent les phénomènes plus loin que les groupes neutres. Pour expliquer cette différence, le hasard ne peut être écarté que pour la première diapositive ( Mann-Whitney, p < .05 ). Le tableau suivant représente les tendances centrales ( médianes ) par groupe et diapositive :
DIAPOSITIVE | Groupe expérimental | Groupe contrôle |
1 | 10 km | 0.5 km |
2 | 15 km | 2 km |
3 | 25 km | 5 km |
TAILLE ABSOLUE ( Question 4 )
D'une façon générale, les groupes ne diffèrent pas significativement, mais le groupe expérimental tend à attribuer une taille plus petite à la troisième diapositive que le groupe neutre ( Mann - Whitney, p > .10 ). Le tableau suivant représente les tendances centrales médianes par groupe et par diapositive :
DIAPOSITIVE | Groupe expérimental | Groupe contrôle |
1 | 20 m | 30 m |
2 | 20 m | 15 m |
3 | 20 m | 100 m |
TAILLE ANGULAIRE
Pour chacune des diapositives, les réponses du groupe expérimental correspondent à une taille angulaire implicite plus petite que celles du groupe neutre. Statistiquement, nous ne pouvons pas considérer les différences comme dues au hasard ( Mann - Whitney, p < .5 ). Le tableau suivant représente les tendances centrales médianes des groupes expérimentaux et neutres ainsi que les tailles angulaires réelles :
DIAPOSITIVE | Groupe expérimental | Groupe contrôle | Réelle |
1 | .11° | 1.89° | 1.65° |
2 | .17° | .23° | 1.65° |
3 | .11° | .86° | 4.35° |
On remarque dans ce tableau que tous les groupes, sauf le groupe contrôle diapositive 1, sous-estiment la taille angulaire, et que cette sous-estimation est ( significativement ) plus importante pour les groupes expérimentaux.
4.5. – DISCUSSION
Les résultats observés corroborent notre hypothèse générale. Les sujets ayant des attentes particulières, manifestées par une dénomination particulière, attribuent au phénomène observé des caractéristiques différentes que les sujets appartenant à un groupe neutre.
D'un point de vue statistique, cette différence n'est significative que pour une variable implicite: la taille angulaire apparente. Mais cette variable est la seule qui a un réfèrent réel dans le stimulus : la taille angulaire réelle.
Ainsi, les résultats pour cette variable montrent, non seulement que les groupes expérimentaux diffèrent des groupes neutres par rapport aux tailles angulaires apparentes, mais aussi que les différences vont dans le sens d'une plus grande sous-estimation, de la taille angulaire.
Ces résultats particuliers peuvent être interprétés par au moins deux hypothèses :
les attentes du phénomène OVNI induisent une sous-estimation de la taille angulaire du PAN observé ;
les attentes du phénomène OVNI induisent une taille angulaire apparente se rapprochant d'un éventuel stéréotype OVNI ( 1 ).
Pour dépasser le stade de l'observation, ces hypothèses doivent être intégrées dans un cadre théorique permettant de les émettre et dans une démarche expérimentale permettant de les tester. Pour l'instant elles ne sont que des interprétations possibles.
(1) Nous avons déjà rappelé, lors de la discussion des résultats de l'expérience A, que la taille moyenne attribuée à un PAN se situe entre 3 et 15 m.
4.6. – CONCLUSION
En dehors de ces interprétations, les résultats observés correspondent à ce que suggéraient les données de l'expérience A :
la question 2 ( distance relative au paysage ) est surdéterminée par les indices extrinsèques ; les différences observées entre les groupes sont trop faibles pour être significatives ;
les questions 3 et 4 et la variable latente "taille angulaire apparente" font appel aux indices intrinsèques subjectifs : sur plusieurs des résultats, les différences observées sont significatives ; en particulier le groupe expérimental s'éloigne plus de la taille angulaire réelle que le groupe neutre.
En résumé, nous pouvons conclure que les résultats vont dans le sens de notre hypothèse générale et illustrent le modèle d'analyse des témoignages proposé : lorsqu'un sujet a des attentes relatives au phénomène OVNI et les actualise au moment de la perception d'un PAN la description de celui-ci en est probablement affectée dans le sens d'une déformation des caractéristiques du stimulus.
5. – EXPERIENCE C
5.1. – INTRODUCTION
L'expérience B a permis de mettre en évidence, sur un même stimulus, le rapport entre la dénomination et l'utilisation d'indices subjectifs pour estimer certaines caractéristiques descriptives ; on a ainsi confirmé ce que l'observation des données de l'expérience A laissait escompter.
Dans l'expérience C, nous nous proposons de généraliser ce rapport à des caractéristiques descriptives plus larges, en présentant un stimulus toujours ambigu mais plus riche dans sa structure et en demandant par la suite une description libre du stimulus observé.
Nous introduisons une autre différence de base dans l'expérience C : au lieu de constituer notre groupe expérimental avec les sujets qui ont manifesté spontanément des attentes du phénomène OVNI, nous induisons ces attentes sur l'un des deux groupes en utilisant la dénomination OVNI pendant la présentation du stimulus photographique ( 1 ).
Ce groupe sera le groupe expérimental, l'autre ne recevra qu'une annonce neutre et sera le groupe contrôle. Après expérience nous testerons la réalité de l'induction par l'apparition de la dénomination OVNI qui devra être plus forte dans le groupe expérimental que dans le groupe neutre.
(1) Nous utilisons dans cette expérience les "processus d'influence" comme un moyen contrôlé.
5.2. - PROTOCOLE EXPERIMENTAL
La situation expérimentale comprend la présentation collective d'une seule diapositive ; il s'agit de la photographie d'un nuage lenticulaire déjà présenté au Bourget. Le temps de présentation est de 10 secondes ( 2 ). Avant la présentation au groupe neutre, l'expérimentateur annonce : "voici une diapositive, regardez-là très attentivement".
(2) Cette durée, qui peut paraître très courte, est en réalité assez importante ; beaucoup d'expériences ( par exemple FRAISSE, 1974 ) montrent que le sujet humain est capable de voir beaucoup d'informations en quelques secondes ; rappelons par exemple que la durée de beaucoup de spots publicitaires télévisés est de 10 sec.
Pour le groupe expérimental, l'annonce est : "voici une diapositive d'OVNI, regardez-là très attentivement".
Les groupes étaient constitués respectivement de 18 et 31 étudiants de 2ème année de psychologie, l'expérience se déroulant au milieu des activités pédagogiques.
Immédiatement après la présentation de la diapositive, les sujets ont visionné un film didactique de 26 minutes, à la fin de celui-ci, l'expérimentateur, revenu sur place, demande aux sujets : "Pouvez-vous décrire sur une feuille, avec le plus de détails possibles la diapositive que nous avons projeté ?"
5.3. - ELABORATION DES RÉSULTATS
Nous n'avons tenu compte que des éléments descriptifs du phénomène lumineux, en dehors de l'environnement représenté dans la diapositive.
Nous appelons "élément descriptif" toute forme verbale ( nominale, adjective ou adverbiale ) non redondante contenue dans un rapport. Par exemple, le rapport "La photo de l'OVNI a été prise de nuit. L'objet ressemble à un chapeau très plat de couleur claire, entouré d'un halo en feu" contient 5 éléments descriptifs.
Nous appelons "dénomination" l'élément descriptif se référant à la totalité du phénomène. Dans l'exemple cité "OVNI" est la dénomination. La totalité des rapports sont dichotomisés par la variable "dénomination" en OVNI ( ou analogues ) et autres termes notés OVNI.
Nous appelons "nombre d'éléments" d'un rapport le nombre d'éléments descriptifs contenus dans le rapport, en dehors de la dénomination ( dans la mesure où le groupe expérimental reçoit une information supplémentaire pouvant induire une dénomination, celle-ci doit être éliminée si nous voulons comparer les deux groupes ). Dans l'exemple cité le nombre d'élément est 4.
Nous appelons "éléments faux" tout élément descriptif qui n'a pas de référent objectif dans la diapositive. Dans l'exemple cité "en feu" est un élément faux.
5.4. - HYPOTHESE OPÉRATIONNELLE
L'hypothèse générale prévoit, dans le cas de la présente expérience, un rapport direct entre le groupe expérimental et la variable "éléments faux". Nous attendons que les sujets appartenant au groupe expérimental rapportent un nombre, significativement plus important, d'éléments faux que ceux du groupe neutre.
Cette hypothèse doit être précédée de deux analyses de contrôle. La première concerne l'action de l'induction d'attentes du phénomène OVNI effectuée sur le groupe expérimental. Nous attendons que les sujets appartenant au groupe expérimental rapportent la dénomination OVNI de façon préférentielle et significative, par rapport au groupe neutre.
Le deuxième contrôle tend, au contraire à tester l'équivalence des deux groupes indépendamment des variables mises en rapport. Il nous paraît sensé de rejeter cette équivalence si les groupes rapportent des nombres d'éléments significativement différents. Dans ce cas, en effet le nombre d'éléments apparaîtrait comme une variable non contrôlée pouvant interagir de façon inconnue avec les variables mises en rapport ( groupe et éléments faux ).
Nous attendons que le groupe expérimental ne diffère pas du groupe neutre, par rapport au nombre d'éléments rapportés.
5.5. - ANALYSE DES RÉSULTATS
DÉNOMINATION
La plupart des sujets du groupe expérimental utilisent la dénomination OVNI ( ou analogues ) pour le phénomène représenté ; très peu des sujets du groupe neutre font de même ( voir tableau ci-dessous ) :
Dénomination | Groupe expérimental | Groupe neutre |
OVNI | 24 | 2 |
OVNI | 7 | 16 |
La probabilité que ces différences soient dues au hasard est très faible, d'un point de vue statistique ( chi-deux, p < .001 ).
NOMBRE D'ELEMENTS
Le nombre d'éléments rapportés varie entre 1 et 9. La médiane du groupe expérimental est 4 celle du groupe neutre 3. Toutefois l'analyse statistique rejette l'idée que les échantillons soient extraits de deux ensembles parents différents ( Mann - Whitney, p > .10 ).
Les deux épreuves contrôle répondent à nos attentes : le groupe expérimental a été influencé par l'information OVNI, mais il peut être considéré équivalent au groupe neutre par rapport au nombre d'éléments.
Nous pouvons procéder à la confrontation des résultats avec l'hypothèse opérationnelle.
ELEMENTS FAUX
Le tableau suivant représente le nombre des sujets par groupe, ne rapportant aucun élément faux ou en rapportant un ou deux ( 1 ) :
Éléments faux | Groupe expérimental | Groupe neutre |
0 | 19 | 17 |
1 ou 2 | 12 | 1 |
(1) Un seul sujet rapporte deux éléments faux.
La probabilité que ces différences soient dues au hasard est faible, d'un point de vue statistique ( chi-deux, p < .05 ).
Les sujets du groupe expérimental rapportent significativement plus d'éléments faux que ceux du groupe neutre.
5.6. - DISCUSSION
Les résultats observés confirment l'hypothèse opérationnelle et vont dans le sens de l'hypothèse générale. Le fait que les attentes du phénomène OVNI ont été induites par l'expérimentateur n'enlève rien au fait que, une fois acquises, ces attentes vont de pair avec une dénomination particulière du phénomène observé et une augmentation significative des distorsions dans sa description.
En extrapolant cette conclusion au modèle d'analyse de témoignages de PAN, il apparaît à nouveau que le témoignage d'un sujet ayant des attentes vis-à-vis du phénomène OVNI ( dévoilées par la signification attribuée au PAN observé ), est probablement plus subjectif que celui d'un sujet qui n'en a pas.
Pour ce qui est du contenu des éléments faux, leur analyse ne permet pas d'élaborer une hypothèse d'explication. Les éléments faux sont divers, ils se réfèrent autant à la forme, qu'à la couleur ou au mouvement du phénomène. En outre, le protocole expérimental ne permet de comprendre l'interaction entre les ( hypothétiques ) éléments attendus et les éléments objectifs du stimulus.
Toutefois, un nombre assez important des éléments faux rapportés semble très compatible avec l'hypothèse de la référence à un stéréotype OVNI.
6. – EXPERIENCE D
6.1. – INTRODUCTION
L'expérience C met en rapport la subjectivité d'un témoignage avec les informations fournies avant l'observation.
Nous avons, dans l'introduction du présent chapitre, rappelé les deux hypothèses sur le rapport entre la subjectivité d'un témoignage et les informations fournies après l'observation. L'une de ces hypothèses générales concerne les enquêteurs, l'autre, les témoins.
Dans la présente expérience, nous avons extrapolé au laboratoire la première de ces hypothèses "la probabilité que la subjectivité intervienne dans un témoignage de PAN croit avec la communication entre le témoin et les enquêteurs sur le phénomène OVNI".
6.2. - PROTOCOLE EXPÉRIMENTAL
Le protocole expérimental utilisé est identique à celui de l'expérience précédente, à la différence près que les deux groupes reçoivent la même annonce de présentation ( "voici une diapositive, regardez-la très attentivement" ) alors que la variable indépendante opérationnelle apparaît au moment de la demande de rappel.
Au groupe expérimental on a demandé : "pouvez-vous décrire sur une feuille, avec le plus de détails possibles, la diapositive d'OVNI que nous avons projeté". La demande faite au groupe neutre est celle indiquée dans l'expérience C. Dans la pratique, nous utilisons en tant que groupe neutre, les mêmes données que celles de l'expérience C ( 1 ).
(1) En réalité, les expériences C, D et E sont issues d'un vaste plan expérimental comprenant 150 sujets répartis en 6 groupes.
Le groupe expérimental est constitué de 38 sujets ( différents, bien entendu, de ceux utilisés dans l'expérience C ).Nous avons procédé à la même élaboration des résultats que dans l'expérience précédente, ainsi qu'aux mêmes analyses de contrôle.
6.3. - HYPOTHESE OPÉRATIONNELLE
Issue d'un cadre théorique analogue à celui de l'hypothèse précédente, l'hypothèse générale prévoit un rapport direct entre le groupe expérimental et la variable "éléments faux".
La théorie des "processus d'influence" montre que le sujet se conforme dans sa réponse perceptive aux informations fournies ( après observation dans le cas présent ) par l'expérimentateur. L'expérience C montre, à son tour, que l'information OVNI va de pair avec des distorsions particulières lors du rappel. Nous attendons que les sujets du groupe expérimental se comportent comme ceux de l'expérience précédente, même si l'information OVNI n'est fournie qu'après présentation du stimulus. Autrement dit : nous attendons que les sujets appartenant au groupe expérimental rapportent un nombre significativement plus important d'éléments faux que ceux du groupe neutre.
6.4. - ANALYSE DES RÉSULTATS
DENOMINATION
Le tableau suivant résume les valeurs observées pour cette variable. La probabilité pour que la différence observée soit due au hasard est très faible ( chi-deux, p < .001 ).
Dénomination | Groupe expérimental | Groupe neutre |
OVNI | 28 | 2 |
OVNI | 10 | 16 |
NOMBRE D'ELEMENTS
L'analyse statistique ne permet pas de penser que les échantillons ( médianes = 4 ) sont extraits de deux ensembles parents différents ( Mann - Whitney, p > .10 ).
Comme dans l'expérience précédente, les deux épreuves contrôle sont positives : le groupe témoin a été influencé par l'information OVNI mais il peut être considéré comme équivalent au groupe neutre par rapport au nombre d'éléments.
ELEMENTS FAUX
Le tableau de la page suivante résume les valeurs observées pour cette variable. La probabilité que la différence observée soit due au hasard est faible ( chi-deux, p < .10 ).
Éléments faux | Groupe expérimental | Groupe neutre |
0 | 26 | 17 |
1 ou 2 | 12 | 1 |
6.5. – DISCUSSION
Les résultats observés sont en accord avec ce qui était escompté à partir du cadre théorique : l'apport d'une "information" particulière, concernant un stimulus antérieurement perçu, est accompagné d'une distorsion significative dans la description de ce stimulus.
Tout se passe comme si "l'information" apportée interférait avec le souvenir du stimulus ( mis en évidence dans le groupe neutre ) en y ajoutant certaines caractéristiques fausses.
De surcroît, cet excédent de caractéristiques descriptives semble être fait au détriment des autres éléments : le nombre total de ceux-ci ne varie pas significativement entre le groupe neutre et le groupe expérimental.
Au plan de l'analyse des témoignages de PAN, ces résultats confirment l'importance de l'absence de questions directives lors d'une enquête, a fortiori lorsque ces questions contiennent des évocations de phénomène OVNI.
Cette affirmation a comme corollaire l'importance de recueillir, lors d'une enquête, tout ce qui se rapporte aux discussions concernant le phénomène observé, auxquelles le témoin a participé. Une importance particulière doit être accordée aux éventuelles conversations avec des enquêteurs amateurs, des journalistes...
La comparaison des données des expériences C et D laisse apparaître des résultats descriptifs intéressants. La comparaison statistique des deux groupes expérimentaux ne permet, pour aucune des variables étudiées ( dénomination nombre d'éléments, éléments faux ) de penser que les échantillons sont extraits d'ensembles parents différents.
On peut alors émettre l'hypothèse que l'effet de l'information OVNI est indépendant, du moment où elle est actualisée : avant ou après l'observation.
7. - EXPERIENCE E
7.1. – INTRODUCTION
On peut considérer que les différences observées dans les deux expériences précédentes dépendent fortement des conditions de l'expérimentation ; l'accent peut être fortement mis en particulier sur la brièveté du délai de présentation ( 10 sec ), suivie dune activité de distraction ( un film de 26 min ).
Ces considérations peuvent mener à l'élaboration d'une hypothèse alternative, selon laquelle on n'observera pas de différence lorsque les conditions d'expérimentation sont optimales pour l'observation du stimulus.
Cette hypothèse ne contredit pas le cadre théorique ; elle se situe à côté de celui-ci en rappelant la possibilité pour le sujet expérimental ( et pour le témoin ) d'avoir un comportement échappant aux processus d'influence.
Avec une attitude strictement exploratoire ( 1 ) nous avons testé cette hypothèse par rapport aux attentes induites pendant l'observation du stimulus, à mi-chemin entre l'expérience C et l'expérience D.
(1) Et non pas hypothético-déductive, qui aurait besoin d'un cadre théorique et d'un plan expérimental beaucoup plus élaborés.
7.2. - PROTOCOLE EXPÉRIMENTAL
Le protocole utilisé est semblable à celui de l'expérience C, sauf qu'il n'y a pas de délais entre la présentation et le rapport, ces deux-là se confondant : la diapositive reste visible pendant la rédaction de sa description.
Les consignes respectives pour le groupe contrôle et pour le groupe expérimental sont les suivantes :
"Décrivez cette diapositive en prenant le temps que vous désirez" ;
"Décrivez cette diapositive d'OVNI en prenant le temps que vous désirez".
La taille des groupes est, respectivement, de 34 et 10 sujets.
7.3. - ANALYSE DES RÉSULTATS
DÉNOMINATION
Le tableau suivant résume les valeurs observées de cette variable. La probabilité pour que la différence observée soit due au hasard est faible ( chi-deux, p < .10 ).
Dénomination | Groupe expérimental | Groupe neutre |
OVNI | 5 | 7 |
OVNI | 5 | 27 |
Nous remarquons dans ce tableau, par rapport aux résultats des expériences C et D, une diminution pour le groupe expérimental et une augmentation pour le groupe neutre du nombre des dénominations OVNI.
La diminution pour le groupe expérimental rentre dans le cadre de notre hypothèse : l'effet des attentes perceptives induites peut être amoindri par une observation optimale du stimulus.
L'augmentation pour le groupe neutre nous semble, au moment actuel de la recherche, être un résultat parasite. Il nous permet de douter de la "neutralité" du groupe.
NOMBRE D'ELEMENTS
L'analyse statistique ne permet pas de penser que les échantillons ( médiane = 4 ) soient extraits de deux ensembles parents différents ( Mann - Whitney, p > .10 ).
ELEMENTS FAUX
Le tableau suivant résume les valeurs observées de cette variable. Les faibles différences observées ne sont pas significatives d'un point de vue statistique ( chi-deux, p > .50 ).
Éléments faux | Groupe expérimental | Groupe neutre |
0 | 6 | 27 |
1 ou plus | 4 | 7 |
Par rapport aux expériences C et D, ce manque de signification statistique est dû à une augmentation des erreurs dans le groupe "neutre".
Toutefois, la différence devient significative ( chi-deux, p < .10 ) lorsqu'on compare le groupe expérimental de la présente expérience avec le groupe neutre des expériences C et D ( comparer le tableau précédent à celui représenté au paragraphe 5.5. ). Bien entendu, la comparaison de groupes émanant de protocoles différents n'est pas conforme à la rigueur expérimentale.
7.4. – DISCUSSION
Les résultats observés sont difficilement interprétables sans l'apport d'autres données expérimentales. La faiblesse de la taille du groupe expérimental ( 10 sujets ) et le nombre relativement important des dénominations OVNI dans le groupe neutre permettent de douter de la représentativité des résultats observés.
En deçà de ces considérations, les résultats peuvent être interprétés de deux façons :
soit comme une confirmation de l'hypothèse alternative : lorsque les conditions d'observation du stimulus sont optimales, les distorsions attribuables aux attentes perceptives diminuent,
soit comme une confirmation de l'hypothèse générale, si on compare les données du groupe expérimental avec celles des expériences C et D. Les nombres d'erreurs des trois groupes expérimentaux ne sont pas significativement différents, mais ils le sont par rapport au groupe neutre des expériences C et D. On pourrait alors conclure que la probabilité que la subjectivité intervienne dans un rapport croît lorsque des informations OVNI sont actualisées avant, pendant ou après l'observation d'un PAN.
7.5. - DISCUSSION GÉNÉRALE DES EXPÉRIENCES, C, D ET E
Rien ne permet de trancher entre les deux interprétations qui précèdent, d'autant plus qu'elles ne sont pas contradictoires : l'effet de l'actualisation des informations OVNI peut ( et en toute logique doit ) s'amoindrir lorsque le sujet est confronté longuement avec le stimulus, sans que pourtant cet effet disparaisse complètement ( 1 ).
(1) Ce qui est en accord avec certaines autres expériences sur les "processus d'influence" ( par exemple, FLAMENT, 1959 ).
Nous ne devons pas oublier que notre but principal est de tester le bien-fondé d'un modèle selon lequel les attentes perceptives du sujet rentrent en conflit avec le stimulus observé ( ou son souvenir ), au point d'introduire des distorsions au moment de sa description.
Nous avons utilisé les techniques des "processus d'influence" avec un but intermédiaire : celui de montrer que ces attentes peuvent être introduites par l'entourage du sujet avant, pendant ou après son rapport.
Un simple regard des tableaux de la variable "dénomination" permet de remarquer que l'influence a eu lieu mais aussi qu'elle n'est pas, bien entendu, parfaite. Quelques sujets des groupes expérimentaux n'explicitent pas la dénomination OVNI, quelques sujets des groupes neutres le font.
Or, c'est bien ce fait qui nous semble capital : il montre que le sujet lui-même actualise des informations OVNI.
Nous avons alors traité ensemble les 131 sujets des expériences précédentes, en les dichotomisant en fonction de la variable "dénomination", et en confrontant les deux groupes ainsi obtenus par rapport aux variables "nombre d'éléments" et "éléments faux".
NOMBRE D'ELEMENTS
L'analyse statistique ne permet pas de penser que les deux groupes ( médiane = 4 ) sont extraits de deux ensembles parents différents ( Mann - Whitney, p > .10 ).
ELEMENTS FAUX
Le tableau suivant résume les valeurs observées de cette variable. La probabilité que la différence observée soit due au hasard est très faible ( chi-deux, p < .0025 ).
Éléments faux | Dénomination | |
OVNI | OVNI | |
0 | 40 | 55 |
1, 2 | 26 | 10 |
Ces résultats sont largement en accord avec notre hypothèse générale, qui met en relation les attentes ( explicitées au travers de la dénomination choisie ) avec les distorsions ( mesurées par les éléments faux ).
Une analyse plus fine de ces résultats ne fait que confirmer cet accord. Nous nous sommes interrogés sur les 10 sujets qui rapportent des éléments faux sans pourtant utiliser la dénomination OVNI :
6 de ces 10 sujets font référence aux dénominations OVNI de façon indirecte "forme d'OVNI" "ressemble à un OVNI"...
2 autres parlent "d'engin", "d'objet".
Nous avons établi, à l'intérieur du groupe OVNI deux sous-classes :
celle qui permet d'évoquer une dénomination OVNI, comprenant les 8 sujets venant d'être cités ; nous appellerons cette classe : # OVNI ;
celle qui ne le permet pas ; celle-ci comprend des dénominations ambiguës ( forme, masse... ) ou ouvertement opposées à la dénomination OVNI ( nuage, météorite... ).
Le croisement de ces deux classes avec la variable éléments faux est résumé dans le tableau suivant. La probabilité que la différence observée soit due au hasard est faible ( chi- deux, p < .05 ) :
Éléments faux | Dénomination | |
#OVNI | #OVNI | |
0 | 22 | 33 |
1, 2 | 8 | 2 |
La réunion des groupes "dénomination OVNI" et "dénomination #OVNI" fait accroître la différence observée ( chi-deux, p < .0005 ). Ces résultats sont parfaitement d'accord avec notre hypothèse générale.
A titre descriptif, nous avons analysé ces "éléments faux". La plupart d'entre eux se distribuent à l'intérieur de quatre grands groupes :
couleurs et luminosités ( 11 éléments faux ) avec une prépondérance du bleu vert clair ; rappelons que le stimulus est en réalité, noir et orange ;
formes ( 11 éléments faux ) avec une prépondérance de la forme sphérique ; rappelons que le stimulus est elliptique ;
mouvements ( 8 éléments faux ) : de décollage de descente, vitesse...
manifestations énergétiques ( 6 éléments faux ) : dégagement de chaleur, flammes, lumière propre...
Il est, bien entendu, hasardeux d'essayer d'interpréter ces données-là. Ces éléments faux sont probablement le fruit d'une interaction entre les éléments réels d'un stimulus particulier et les attentes des sujets.
Signalons toutefois que les éléments faux "mouvements" et "manifestations énergétiques" ont des chances de s'accorder avec l'hypothèse de la référence à un stéréotype OVNI.
8. – EXPERIENCE F
8.1. – INTRODUCTION
Nous ne saurions clôturer cette série d'expériences sans parler d'une qui, en raison d'un incident spontané, se rapproche des conditions naturelles, tout en allant dans le sens dune de nos hypothèses : celle mettant l'accent sur l'importance du processus d'influence qui peut intervenir entre témoins co-présents et communicant entre eux leurs impressions.
8.2. - PROTOCOLE EXPERIMENTAL
Le stimulus présenté est la diapositive d'un nuage lenticulaire, déjà utilisée dans les expériences précédentes. La présentation est précédée de la consigne : "Nous allons vous projeter une diapositive pendant une durée de quinze secondes. Vous la regardez bien. Nous vous demandons de ne pas communiquer entre vous."
Arès la présentation effective de 15 secondes on demande : "Nous vous demandons d'inscrire sur le papier qui se trouve devant vous ce que vous avez perçu sur cette diapositive".
Ce protocole a été appliqué à deux groupes de 34 élèves de seconde AB composés de filles et de garçons en nombres égaux.
Le but de l'expérience ( 1 ) fut déjoué par un sujet du premier groupe qui sitôt la projection commencée s'est exclamé : "Ouah un OVNI !"
(1) Qui était d'étudier un processus particulier d'influence.
Ce premier groupe constitue par la force des choses le groupe expérimental, où la variable dépendante, l'actualisation d'une information OVNI par un co-observateur, prend la valeur positive.
Heureusement, aucun des sujets du 2ème groupe ne parla pendant le déroulement du protocole. Il constitue ainsi le groupe neutre où la variable dépendante prend la valeur nulle.
Le type de dénomination observée dans les réponses écrites des sujets constitue la variable dépendante, dichotomisée en "OVNI" ou analogues et "non OVNI".
8.3. - HYPOTHESE OPÉRATIONNELLE
Le groupe expérimental devrait fournir un nombre significativement plus important de dénominations OVNI que le groupe neutre. Cette hypothèse est assez évidente : elle s'appuie sur l'énorme masse de données empiriques de la théorie des processus d'influence. Son intérêt réside simplement dans son application au domaine du témoignage de PAN, et dans la spontanéité de la situation qui nous a permis de l'émettre.
8.4 - ANALYSE DES RÉSULTATS
Le tableau suivant résume les résultats observés. Le traitement statistique indique que la probabilité que la différence observée soit due au hasard est très faible ( chi-deux, p < .00001 ).
Dénomination | Groupe expérimental | Groupe neutre |
OVNI | 23 | 6 |
OVNI | 11 | 27 |
8.5. – DISCUSSION
Il nous semble que l'importance des résultats observés réside beaucoup plus dans ses éventuelles généralisations que dans la puissance de la confirmation d'une hypothèse évidente.
Le groupe neutre peut être considéré comme assez représentatif : laissés libres de leurs dénominations, moins d'un tiers de ses sujets choisissent des dénominations OVNI. Ce résultat est analogue à ceux observés dans les expériences précédentes, malgré les différences entre les protocoles et les populations : 20 % ( A ), 11 % ( C et D ), 20 % ( E ), 18 % ( F ).
Le traitement statistique confirme que les différences entre ces proportions ne peuvent pas être interprétées comme des différences au niveau des ensembles parents ( chi-deux, p > .80 ).
Mais, ce tiers de dénominations OVNI bascule à deux tiers dès que l'un des sujets indique aux autres sa réponse. Ces résultats se rapprochent significativement à leur tour des groupes expérimentaux des expériences précédentes : 77 % ( C ), 74 % ( D ), 50 % ( E ), 68 % ( F ) ; chi-deux, p > .30.
Le présent protocole, qui ne demandait que la dénomination du stimulus ne permettait pas de constater des erreurs dans les rapports faits par des sujets du groupe expérimental.
Cependant, les rapprochements entre les différentes expériences permettent de penser que, dans le cas présent comme dans les autres, nous aurions pu constater un nombre plus important d'éléments faux chez les sujets utilisant la dénomination OVNI pour désigner le phénomène observé.
Cette proposition a des conséquentes importantes au plan de l'étude des témoignages. Elle pousse à être attentif aux éventuelles influences entre témoins d'un même phénomène, en particulier lorsqu'on constate la facilité avec laquelle "Ouah, un OVNI !" fait monter de 18 % à 68 % la proportion des dénominations OVNI.
9. – DISCUSSION GENERALE
Nous pouvons continuer la synthèse des résultats de toutes les expériences précédentes, en nous centrant sur deux plans.
Au plan théorique, la confirmation de toutes les hypothèses opérationnelles donne à l'hypothèse générale la force des faits qui épousent parfaitement les prévisions issues d'un champ théorique général.
Il nous semble que la preuve est faite de la solidité de la démarche mettant en rapport des théories psychologiques bien établies et un domaine d'investigation particulier : le témoignage de PAN.
En conclusion, l'assertion, la probabilité que la subjectivité intervienne dans un témoignage croît lorsque des informations se référant au phénomène OVNI sont actualisées, par le témoin ou son entourage, avant, pendant ou après son observation de PAN semble être une hypothèse de travail solide, qui mérite d'être approfondie.
Au plan de l'application pratique à notre domaine d'investigation particulier, les résultats observés constituent des assises solides pour le modèle d'analyse des témoignages proposé au chapitre 2.
Plusieurs cas d'espèce ont été étudiés : celui des attentes déjà acquises vis-à-vis du phénomène OVNI, celui des attentes induites peu avant ou pendant l'observation, et celui où un processus d'influence intervient au moment de l'interrogation.
Dans tous les cas, les sujets concernés ont une tendance relativement forte à distordre les caractéristiques du phénomène observé.
En outre, dans la plupart des cas, la dénomination OVNI prend la place d'une variable intermédiaire entre les attentes et les distorsions.
Le modèle d'analyse des témoignages proposé ne fait que suivre le cheminement inverse de celui qui vient d'être présenté. Le but recherché étant d'écarter les témoignages ou éléments de témoignage pouvant être fortement subjectifs, l'analyse préconise l'étude des rapports entre le témoin et le phénomène observé, son entourage, ses opinions et attitudes vis-à-vis du phénomène OVNI ( voir paragraphe 1.2.9. ).
Cette étude débouche sur une évaluation qui pondère le témoignage ou l'élément de témoignage, en fonction de la probabilité que la subjectivité y intervienne.
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